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Fin de semaine ordinaire

Publié le 16 décembre 2013 par Masterpitch

L’invité du lundi, c’est Piki. L’homme qui nous a rendu hommage un jour, souvenez-vous…

Fin de semaine. Vendredi soir. Enfin !

Je suis claqué. Voilà sept jours que j’enchaine les points avec mes gars en oubliant de bouffer. Ma moyenne de caféine quotidienne est passée au stade critique. J’ai les mains qui tremblent en permanence. Je devrais vraiment me mettre à cloper. Au moins j’aurai une bonne excuse pour prendre des pauses.

En bon élève docile, j’ai subi toute la semaine les foudres répétées de mon chef sans broncher. Quand il sort du bureau du boss, il passe toujours au mien pour gueuler un bon coup. Ça le détend. Discours insensés, tirades interminables et dramatiques. « C’est la crise. Pire que les subprimes. Il faut trouver les responsables, les virer, les buter… j’m’en fous ! » Le mécanisme est bien huilé, le passage de relais millimétré et systématique. Depuis trois heures je ne peux littéralement plus réfléchir. J’ai les yeux explosés rivés sur mon PC. Je ne vois rien. Je passe d’une fenêtre à l’autre sans analyser ce qui se passe. J’attends que l’après-midi passe. Le dernier point était une blague. En cumulé il devait y avoir un demi cerveau pour quatre en salle de réunion qui se débattait tout seul pour essayer d’avancer. Eurêka ! Au bout de quarante-cinq minutes, je lâche le « on reporte à lundi » salvateur. Miracle !

Mais tout ça, c’est fini. Week-end ! Je débranche la machine et je rentre au bercail. Je vais formater mon cerveau pour deux jours.

En m’installant au volant de la voiture, j’ai un regain d’énergie. Grosse motivation enchanteresse. Ce soir on va s’enfiler des canons avec les potes en matant le match. Une bonne soirée comme on les aime pour entamer le week-end. De la balle, je suis boule de feu ! En plus j’ai regardé le trafic et je ne devrais que mettre une heure pour rentrer. Pas de bouchon à l’horizon. Je m’engage sur la route à tombeaux ouverts.

Quel con ce 75 avec son gros 4×4 de friqué. Il a une super bagnole et il n’avance pas tout en restant sur la file de gauche ! C’est quoi ce ralentissement en pleine ligne droite ? Faut pas déconner là ! Ooh, regarde dans ton rétro avant de déboîter tocard ! On file vraiment le permis à n’importe qui maintenant ! Une femme, je l’aurais parié ! Encore des pubs, mais vous pouvez pas passer un peu de musique de temps en temps sur cette radio ? Et la priorité à droite, tu connais ? Ce gros 38T ne va quand même pas dépasser son pote maintenant ? Le con, il le fait !

Encore un bouchon ! Mais qu’est-ce qu’ils ont à tous s’envoyer dans le décor ce soir ? C’est le festival des pannes de bagnoles ou quoi ? Laissez-moi rentrer bordel, je suis en week-end ! Vous allez me foutre en retard pour mon rencard avec les potes. Déjà 1h43 que je roule. Encore douze kilomètres avant destination. Vitesse moyenne neuf kilomètres par heure. J’éteins la radio. Silence. Je suis en roue libre, le cerveau sur off. J’enchaine mon troisième bouchon sans aucune réaction. Le match est entamé depuis un quart d’heure. Les potes m’ont appelé trois fois déjà et ont l’air bien chauds après les deux premières pintes enquillées. Téléphone éteint. J’ouvre la fenêtre et reste imperméable au vacarme extérieur. Les espaces que je laisse pour laisser passer mes congénères sont désormais béants. Quelle courtoisie. Fini de zigzaguer entre les voitures. Tout droit. En plein dedans. Résigné. A quoi bon gueuler après tout ?


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