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Lourds devoirs et bons plaisirs

Publié le 16 décembre 2013 par Jlk

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Notes en chemin (102)

  

Malentendus divers. - La culture contemporaine, ou ce qu'on appelle comme ça, donne souvent lieu à des malentendus, tant le paraître et l'être, le désir réel et le simulacre social, le goût personnel et le mimétisme collectif se mêlent sur fond de consommation à grande échelle. Après quelque 7000 kilomètres en un peu moins de cinquante jours, à travers la France, le Portugal et l'Espagne, avec Lady L., nous pourrions établir la liste des "monuments incontournables" que nous aurons zappés, tout en ayant l'impression d'avoir acquis et partagé une quantité d'impressions et d'émotions vivifiantes.

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Lumière de Grignan. - Hier encore, nous étions à Grignan pour notre dernière étape. Or ce n'était ni pour y saluer Philippe Jaccottet ni pour nous incliner devant la statue de Madame de Sévigné. Au déclin du jour et dans une lumière orangée mêlant le brun et le mauve, nous avons juste flâné dans le vieux bourg en constatant qu'il s'y trouve plus de librairies et d'ateliers d'artistes qu'à Benidorm et La Grande Motte réunis, avant de souper dans un charmant restau à l'enseigne de L'Etable.

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Au préalable, ma bonne amie, fatiguée par des heures de conduite, s'était reposée sous une belle gravure de Corto Maltese, à l'Hôtel Sévigné dont notre chambre déclinait le thème de la mer et des marins; et moi j'avais passé une belle heure en compagnie du libraire Jean François Perdriel, de chez lequel j'étais sortis avec  des ouvrages aussi rares que ridiculement bon marché de Marcel Aymé et Jacques Audiberti, ainsi qu'un irrésistibleDictionnaire superflu à l'usage de l'élite et des biens nantis, de Pierre Desproges, et l'essai de Benjamin Crémieux Du côté de Marcel Proust qu'un malotru ne m'a jamais rendu. Dans la foulée, après que je lui eus raconté mes deux visites au poète,  le libraire m'a donné les dernières nouvelles de la santé de celui-ci (plutôt bonnes)  et recommandé la lecture de son hommage funèbre à André du Bouchet. Et ce n'est pas de la culture, ça ?

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Bilan multipack. - Si nous n'avons visité ni le Musée des blindés de   Saumur ni la cathédrale de Saint-Jacques, ni la Mezquita de Cordoue ni l'Alhambra de Grenade, nous avons "fait" la tapisserie de l'Apocalypse et sommes descendus dans la contrefaçon saisissante  de la grotte d'Altamira avant de monter la rampe en 34 sections de la Giralda de Séville, ainsi que les 45 étages de l'hôtel Bali à Benidorm de la terrasse duquel on voit presque l'Afrique et peut-être même Dieu par temps clair.

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Mieux: nous avons commencé à nous initier aux langues espagnole et portugaise que d'innombrables résidents étrangers s'opiniâtrent arrogamment à ignorer, et j'ai fait en voiture, à Lady L.,  la lecture de quatre recueils de nouvelles d'Alice Munro, prix Nobel de littérature 2013,constituant un fonds prodigieux d'observations humaines.

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Cependant l'essentiel de ce périple n'aura  pas été que de nature livresque ou borné à ce qu'on appelle la culture. Disons que nous aurons vécu: vécu chaque jour, vécu notre relation, vécu des amitiés, vécu des rencontres et des interrogations, vécu le sud et les séquelles visibles de la Crise, vécu l'immensité des pays et les particularismes de chacun, avec l'envie souvent (à Porto, à Séville, à Barcelone) d'y revenir, comme nous reviendrons peut-être à Carvoeiro ou à Tamariu...

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Au demeurant le voyage continue. Sommes-nous vraiment arrivés, et étions-nous même partis ? Dites: vous savez ce que c'est, vous, que le voyage ?      


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