Magazine Journal intime

Stupeur et faux-fuyant

Publié le 14 mai 2008 par Boo
Ma future belle-mère est coiffeuse. Ca me pose un problème.
J’imagine que beaucoup de filles sauteraient de joie à l’idée que belle-maman puisse leur refaire leur balayage à l’œil et à volonté. Moi pas.
J’ai un rapport un peu particulier à mes cheveux. Enfin, pour dire les choses plus franchement, j’ai un rapport inexistant à mes cheveux. Il se résume en deux mots : PAS TOUCHE ! Pas touche et bas les pattes, coiffeurs intégristes du ciseau, copines pas bien sevrées de leur période Petit Poney, petite cousine tortionnaire de poupées Barbie, et belle-maman bien intentionnée.
Pas touche parce que :
  • J’aime pas être bien coiffée (j’aime avoir la tignasse emmêlée et le cheveu sauvage, oui, c’est mon choix et ça se discute pas.)
  • Ca fait mal (si si, ça fait mal !)
  • Ca m’énerve. Parce que. Point.

Depuis que je suis minotte, j’ai tant et si bien appliqué ce principe qu’à l’âge de 28, j’en étais là :
La Cousine Machine  1m10 de tignasse. 1m10 de friche sauvage, terra incognita de l’homo capillectophile.
Et puis bon, il faut bien reconnaître, c’est pas pratique de se balader avec tout ce poil flottant au vent derrière soi. Tu passes une porte, tu te retrouves happé par la poignée. Tu cuisines une fondue et on accuse Marius d’y avoir largué son fil dentaire. Tu fais pipi et t’a intérêt à faire passer la touffe côté face. Ton chéri se retourne dans le lit et tu hurles que BORDEL T’ES SUR MES CHEVEUX. Sans compter les joyeuses galéjades des potes (« tu t'assoies pas dessus quand tu fais caca ? »), des concupiscents (« on peut toucher ? ») et des petits cousins (« oh vas-y Boo fais nous encore le Cousin Machin ! »). Etc, etc. Vous voyez le tableau. Alors l’été dernier, j’ai coupé court. Enfin, mon papa a coupé court. Mon papa qui est pêcheur et pas coiffeur. Il a coupé court et en biais. C’est conceptuel, tendance, rafraichissant et utilitaire. M’enfin, c’est un court relatif. Un court mi-dos. Tirant plus vers les fesses que vers les épaules, d’ailleurs, le mi-dos.
Mais bref. Ca laisse encore largement la place à la fantaisie chignonesque.
Ce qui nous ramène à ma future belle-mère. Ma belle-mère qui, le jour où son fils lui annonçait que nous allions nous marier, s’est retournée vers moi et, au lieu de me crier « voleuse de fils ! », s’est exclamée « Oh je vais enfin pouvoir te faire une belle coiffure pour l’occasion ! ». Gasp. J’avais pas pensé à ça avant de dire oui, moi.
Or il se trouve qu’à cette généreuse proposition, j’ai juste envie de répondre « non ». Non, merci, mais ça va pas être possible.
Parce que, chez ma belle-mère,  le chaton vide-miette de table, le chien dans son cadre doré, les rideaux décorés de papillons à paillettes, le napperon sur la télé, la fontaine dauphin, le nain de jardin et sa brouette de géraniums, m’ont mis depuis longtemps la puce à l’oreille : je crois bien que ma belle-mère et moi, on a pas la même notion du "beau". Et sans prétendre avoir le monopole du bon goût, il n’y a aucune façon de concilier la sienne, de notion, et la mienne. Aucun doute à ce sujet. Et il serait étonnant qu’en matière de coiffure, il en soit autrement.
A peine me faisais-je cette réflexion, que je me retrouve avec un book coiffure sur les genoux. « Mes plus beaux chignons de mariage », me dit-elle d’un ton ému. « Dis moi un peu ce que tu aimes, et puis on pourra faire des essais. »
Alors, nous avons là : de la banane laquée, de la scarole défrisée, une version audacieuse du calamar suédois, une choucroute printanière, j’en passe, et des plus affreux.
Et là je sais clairement que ça va pas être possible. Des concessions, pour ce mariage, je vais en faire des tonnes, de la bouffe au DJ en passant par la cravate de monsieur, mais pour ma tignasse, c’est non, merci.
Seulement voilà, je lui dis comment, ça, moi ? « Euh non Ghislaine, je n’aime pas du tout ce que vous faites » ? La critique est aisée, l’art est difficile, et la coiffeuse est susceptible. Il y a des mariages qui ont tourné au drame pour moins que ça.
Alors, quand, la semaine dernière, elle est revenue à l’attaque (« au fait, il faut qu’on se cale un week-end pour faire des essais chignons, j’ai pleins d’idées, tu vas a-do-rer »), j’ai compris qu’il allait falloir trouver une solution d’urgence. Pour ménager la chèvre, le chou et la pièce montée, j’ai réfléchit très fort et j’ai mis au point quelques parades. Mais dans la foulée, j’ai bien cerné leurs faiblesses, aussi.
  • Tentative d’esquive n°1, dite "la sournoise" : le chapeau. Parce que qui dit chapeau dit impossible d’y caser une choucroute dessous.
  • Inconvénient : il semblerait que mes sources soient obsolètes, et que le chignon se marie très bien avec le chapeau.
  • Tentative n°2, dite "la lâche" : la disparition de mariée (avec aménagement préalable d’une planque douillette). Du matin même jusqu’au parvis de la mairie. Pas de mariée, pas de tripatouillage de cheveux de mariée.
  • Inconvénient : appel des pompiers, réquisition de la police, perquisition de ma planque, et coiffage menottes aux poignets.
  • Tentative n°3, dite "la Guybrush" : « oh regardez Ghislaine, derrière-vous, un singe à trois têtes ! »
  • Inconvénient : la paire de baffe.
  • Tentative n°4, dite "la radicale" : la boule à zéro. Pas de cheveux, pas de chignon. Simple, efficace, imparable.
  • Inconvénient : ben, la boule à zéro quoi...
  • Tentative n°5, dite "la raisonnable" : être diplomate, honnête mais pas trop, franche mais pas crue, gentille mais ferme.
  • Inconvénient : sur le papier, c’est beau. Mais en vrai, je vous le dis, ça être chaud du slip ! Vous la connaissez pas ma belle-mère !

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