Magazine Journal intime

Une croute de carré blanc sur fond blanc

Publié le 04 janvier 2015 par Ecribouille @Ecribouille

J’ai toujours été attirée par la peinture, et je n’ai pas aucune idée de pourquoi. Sans doute étais-je jeune intéressée par les images et que j’ai nourri la chose grâce à de longs feuilletages d’albums à la bibliothèque de l’école. La sculpture, pas trop mon truc, à part les œuvres de l’art cinétique que je trouve géniale dans leur gestion du rapport à l’espace.

Mais le tableau, la peinture, la croute quoi… qu’est-ce que c’est ?

Une forme d’art consacrée

La peinture, ah la grande peinture, quand on évoque cette idée quelles sont les œuvres qui vous viennent tout de suite en tête ? On pense alors facilement aux peintres célèbres qui ont fait la gloire de la culture française et francophone : Monet, Van Gogh (Hollandais mais a quand même longtemps vécu en France), Picasso, Manet…

Le film Thomas Crown (remake de 1999) dont le sujet, hors les belles courbes de Renée Russo et le torse velu de Pierce Brosnan, a pour sujet central le tableau d’un tableau de Monet. Pour un film hollywoodien, on ne pouvait que choisir un peintre emblématique que tout le monde connaît. Dans Le coursier, monument cinématographique français avec Michael Youn, la star est Rembrandt.

Tableau de Paul Cézanne, Montagne Sainte-Victoire (1904), huile sur toile, 70 x 92 cm, Philadelphia Museum of Art, Philadelphie

Tableau de Paul Cézanne, Montagne Sainte-Victoire (1904), huile sur toile, 70 x 92 cm, Philadelphia Museum of Art, Philadelphie

Mais comme une chanteuse de variété française passant derrière Alicia Keys dans un concert, être un peindre contemporain doit être terriblement difficile. Passer derrière tant d’innovations, de créations, et de bouleversements dans les représentations figuratives ou abstraites, comment faire valoir son travail ? Je ne doute pas que les galeristes font alors très bien leur boulot. On voit effectivement des peintures dans les galeries d’art du Marais, et aussi lors de la Fiac. Même si, phénomène intéressant, il y a aussi à la Fiac quelques opportunités d’acheter des tableaux de Basquiat… plutôt art moderne que art contemporain. Rappelons que Jean-Michel Basquiat est décédé en 1988. Je n’étais même pas née ! On peut donc faire mieux dans le genre contemporain.

Carré blanc sur fond blanc

J’ai l’impression que dans la mémoire collective, on a élevé la peinture française du XIXe siècle comme représentant la peinture elle-même. C’est le musée d’Orsay qui doit être content !
On admet qu’on puisse représenter quelque chose d’une manière différente assez facilement. La photographie étant passée par là, je remarque un grand nombre de productions contemporaines extrêmement réalistes, plus que réalistes même. Moi qui suis une fervente défenseuse du trait spontanée, ce n’est pas forcément une forme de peinture qui m’intéresse bien que je trouve cela très esthétique.

Et il y a le reste. L’art moderne qu’on n’aime pas, l’art contemporain qu’on ne comprend pas. Une grande partie du monde voit l’art contemporain comme un cercle fermé qui brasse du fric comme on déblaie la neige dans la cour. Non seulement on ne comprend pas grand chose, mais en plus il faut avoir la culture et la stature correspondant à la production du moment pour accéder à une interprétation. Pas de médiation culturelle, puisqu’on est ici dans un contexte mercantile, logique. Des artistes comme Jeff Koons ont d’ailleurs permis de nourrir cette réputation un peu consanguine et très financier de l’art contemporain.

Alors lorsque je me promène dans les galeries, et que je regarde les peintures, je me pose tout un tas de questions. Images héritières, mais héritières de quoi. Que se passe-t-il sur cette croute, comme dirait Marc dans la pièce de théâtre Art de Yasmina Reza. Je me demande aussi comment perçoivent les personnes autour de moi le tableau. Sont-ils là pour apprécier sa valeur décorative, vantée par les chaines d’impression d’image contemporaines comme Galerie Sakura ou YellowKorner ? Ou bien, contrairement à moi, ont-ils bénéficié d’une explication, de la culture nécessaire pour apprécier l’œuvre plus loin que son aspect esthétique ? On dit que l’art permet d’éveiller des sentiments, mais quels sentiments lorsqu’on n’a pas accès aux matériaux pour apprécier une œuvre ?

Et vous, quel est votre sentiment lorsque vous rencontrez des œuvres contemporaines ?


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