Magazine Journal intime

Shoah : pourquoi il faut continuer à en parler

Publié le 27 janvier 2015 par Mpbernet

aujourd'hui (Joel Saget)

Je suis née après la guerre. Mes parents n'étaient pas en France durant celle-ci. Personne, dans ma famille n'a souffert de discrimination. Je n'ai jamais entendu parler des camps avant l'adolescence. Et puis au lycée, dans les années 60, on nous a passé "Nuit et Brouillard" d'Alain Resnais. Et ce fut le choc. Absolument, horriblement et définitivement. Le contact avec l'inimaginable, l'inconcevable, le trou noir dans la nature humaine ...

J'ai depuis beaucoup étudié cette période, mais je n'ai jamais pu apporter de réponse à cette question : après le comment, pourquoi ? Et aussi comment est-il possible que certains "savants" aient pu mettre en doute l'existence des camps d'extermination, malgré les témoignages des rescapés, les preuves matérielles, les images tournées par les libérateurs américains, britanniques et soviétiques. Comment cette sorte de théorie du complot, que l'on voit fleurir à nouveau à tous propos et à tout les coins de l'internet peut-elle encore fleurir ...

Voilà pourquoi il faut en parler, encore et toujours. Sur les 2500 qui sont revenus vivants des camps, il reste aujourd'hui 200 Juifs de France partis pour Auschwitz-Birkenau. Pour eux, et surtout pour tous ceux, les millions, qui sont morts, nous devons continuer à porter la parole qu'il n'auront bientôt plus. Parce que cette histoire est tellement incroyable que les jeunes générations auront - ont -  peine à la croire et qu'ils risquent de vouloir l'oublier. Pousser l'atroce aussi loin, même les peintres du Moyen-Âge qui dressaient des images du Jugement dernier pour terrorriser les fidèles ne l'avaient pas imaginé.

Et pourtant, une partie significative de la population contine à crier dans les rues ou à penser dans son fort intérieur "Mort aux Juifs", et même certains sont passés à l'acte. En référence sans doute à la politique de colonisation de l'Etat d'Israël, mais pas que. Et s'enrôle pour un idéal de carnage auquel nous sommes totalement étrangers.

La cinéaste Marceline Loridan-Ivens, déportée en 1944 à 16 ans dans le même convoi que Simone Veil, dit dans Le Figaro de ce matin : "Quand j'ai entendu "Mort aux Juifs" lors de certaines manifestations, je me suis dit qu'est-ce que je fais, je saute par la fenêtre ? Je m'en vais ? Dans quel pays je suis ?"

Eh bien moi, j'ai honte. Moi aussi, je suis inquiète. J'ai envie du lui demander pardon au nom de tous les miens. Et qu'elle sache que j'enseignerai à mes petits-enfants tout ce que des hommes ont fait à d'autres en cette seconde partie du XXème siècle.


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