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CAMEROUN – FRANCE. Les attitudes coupables de Paris

Publié le 25 mai 2015 par Menye Alain

le sphinxGabriel Makang pour le Sphinx Hebdo

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Les psychologues nous apprennent qu’un sentiment de culpabilité se manifeste assez souvent par un excès de zèle en direction de la victime. Par exemple, la justice française est très sévère envers tout acte soupçonné d’antisémite au point où le gouvernement en profite pour régler ses comptes envers certains individus en les taxant arbitrairement d’antisémite; Dieudonné en sait quelque chose. Cette attitude de la France vient du fait que, malgré les dénégations officielles, ce pays ressent au plus profond de lui un sentiment de culpabilité tenace envers les juifs car il a collaboré avec l’Allemagne Nazie, sentiment qui est solidement inscrit dans sa conscience collective. Pour preuve nous n’avons qu’à parcourir la liste des « Collaborateurs » français du nazisme.

  • Le Marechal Pétain était constitutionnellement le chef de l’état avec les pleins pouvoirs.
  • Pierre Laval était le président du conseil des ministres, c’est-a-dire le premier ministre.
  • L’Amiral François Darlan, vice-président du conseil des ministres et ministre de la marine.
  • Louis Darquier de Pellepoix qui a remplace un autre collaborateur Xavier Vallat au poste de commissaire général aux affaires juives.

En bref, pratiquement tout le gouvernement et la haute administration française. A cela, il faut ajouter les partis politiques, les syndicats, les intellectuels, la presse, les entreprises dont Renault, la SNCF ne sont que des exemples.

L’histoire a souvent cette attitude curieuse de se répéter et c’est ce qu’elle fait dans les relations entre la France et le Cameroun. Après que tous les éléments objectifs aient désigné comme l’un des instigateurs et soutien de Boko Haram, alors que le froid règne entre les 2 pays, voilà que la France se lance dans une frénésie ininterrompue d’actes de bienveillance pour le moins suspects qui dissimulent mal le malaise de sa position. Ce qui ajoute à la curiosité de cette attitude c’est sa soudaineté.

Au plus fort du conflit que le Cameroun menait contre Boko Haram, alors que d’autres puissances telles que la Russie et la Chine manifestaient sans ambiguïté au Cameroun et de façon pratique leur soutien, la France soi-disant amie de ce pays est restée étrangement silencieuse, ne limitant son activité qu’à des réunions et motions de soutien. Elle ne s’évertuait par ailleurs qu’à poser des actes qui la rendaient encore plus suspecte comme par exemple demander le droit de passage de ses troupes au Cameroun alors qu’elles pouvaient passer par la voie des airs ou le droit d’installer dans la partie Nord du Cameroun une base militaire.

Lorsque le conflit tirait vers sa fin, constatant qu’elle etait en train d’être mise hors-jeu dans le règlement de ce conflit, elle crée de toutes pièces une cellule de renseignement dont elle serait la coordinatrice, comme un loup cherchant à infiltrer la bergerie. Le gouvernement camerounais accepte le principe du bout de lèvres en admettant quelques officiers de liaison français dans son quartier général.

La France, malgré les dénis de ses officiels, notamment ceux de son ambassadeur au Cameroun Mme Christine Robinchon et plus tard ceux de Laurent Fabius, le Ministre des Affaires Etrangères ne s’offusque pas vraiment de ce traitement de méfiance que les autorités camerounaises. D’accord, le gouvernement camerounais n’a pas fait d’accusation officielle contre la France qui justifie des actions de rétorsions, mais le climat de froid qui règne entre les deux gouvernements est indéniable. Le Cameroun par exemple n’avait pendant longtemps pas envoyé un représentant dans la cellule de renseignement créée par la France.  Et qui dit froid, dit distance et manque d’enthousiasme à combler l’autre de « faveurs ». Mais ce n’est pas ce que la France fait.

Elle envoie ses agences de coopération, ses officiels de grand niveau et ses ONG les mains chargées de cadeaux pour le Cameroun alors que d’autres pays comme le Tchad, le Nigeria ou le Niger sont dans le besoin.

Le 27 octobre 2014, le Président de votre Assemblée Nationale M. Claude Bartolone  arrive en visite officielle au Cameroun dans le but de réchauffer les relations entre les 2 capitales.

Le 29 janvier 2015, deux Parlementaires  MM. Pierre Lellouche (député UMP, parti de M. Nicolas Paul Stéphane Sarközy de Nagy-Bocsa dit Nicolas Sarkozy ) et Philippe  Baumel (député  PS de  M. François Hollande), débarquent  à Yaoundé pour entre autres de contribuer au redémarrage des secteurs de l’Agriculture et de l’élevage au Cameroun et spécialement dans sa partie Nord

Le 22 février 2015 c’est le tour du Ministre des Affaires Etrangères, M. Laurent  Fabius  qui descend à Yaoundé visite au cours de laquelle il déclare « la France est l’amie du Cameroun ». Et que  son «  pays fera tout pour faire valider par le Conseil de Sécurité de l’ONU, le plan adopté par les  Chefs d’Etat de la CEEAC à Yaoundé  contre  la Secte Islamiste  Boko Haram ».

Du 3 au 13 Mars 2015 La France offre une formation de tirs aux soldats camerounais à N’Gaoundéré

En début Mai 2015, ce pays offre encore une formation à 60 militaires camerounais dans la lutte contre les engins explosifs de Boko Haram.

Le 15 mai 2015, c’est le Général Denis Favier, le directeur général de la gendarmerie française qui rend une visite de travail à son homologue camerounais Jean-Baptiste Bokam, le Secrétaire d’Etat à la Défense chargé de la Gendarmerie, visite au cours de laquelle le français couvre le camerounais de louanges dans un ton naturellement paternaliste.

« La France aux côtés des Autorités camerounaises, offre 750 millions de FCFA aux Réfugiés et Déplacés camerounais, nigérians et centrafricains provoqués par Boko Haram »

« La Croix Rouge Française fait un don de 262 millions de FCFA aux réfugiés et déplacés à l’Est et à l’Extrême-Nord du Cameroun » ;

« La France, par le canal de l’Université de Nantes offre une dizaine d’ordinateurs à l’Université de Douala et à l’IUT  Fotso Victor à Bandjoun »

« La France accorde 38 milliards de FCFA au Cameroun en réduisant sa dette  dans le cadre du CD12 ».

Nous passons par-dessus la grosse blague de Jean-Pierre Borloo qui s’est récemment donné pour mission d’électrifier toute l’Afrique, dont le Cameroun fait partie.

Qu’est-ce que Paris veut bien réparer par cette sollicitude extrême pour Yaoundé qui est pourtant constamment attaqué par la presse aux ordres de la France ? Ce genre d’engouement ne s’est pas vu en près de 100 ans de relations entre notre pays et la France. Même les sceptiques, ceux qui ne veulent pas voir la main de la France derrière Boko Haram doivent trouver cela curieux !

C’est vraiment comme si la France faisait la cour au Cameroun, mais s’y prend mal. Elle se comporte comme un homme ayant beaucoup de femmes, qu’il maltraite et dont il abuse et qui décide de discipliner par le fouet l’une d’entre elles, jugée un peu rebelle par l’intermédiaire de l’un de ses hommes de main. Son gros bras, contre toute attente se fait tabasser par la femme dont le mari avait mal évalué les forces. Se rendant compte que la violence ne marche pas avec cette femme qui risque d’entraîner les autres dans sa rébellion, il décide d’’utiliser de façon hypocrite la méthode douce. Il cajole, offre des parfums, propose des sorties et d’autres choses de cette nature mais n’arrive pas à comprendre que les choses ont changé et que la jeune femme s’est émancipée et a même d’autres prétendants.

La France, comme les Etats-Unis avec le Venezuela devient ici victime du complexe du puissant et se retrouve dans une situation difficile similaire. Le complexe du puissant est un état d’esprit qui empêche les entités puissantes de voir qu’il y a une alternative à la force qui puisse leur être plus bénéfique. C’est de ce complexe dont Israël souffre vis-à-vis des palestiniens et que l’Arabie Saoudite est en train d’exprimer au Yémen.

Lorsque Chavez arriva au pouvoir avec son intention de libérer le pays du joug du couple multinationales-élites locales et de  procéder à un partage plus équitable des richesses nationales, les Etats-Unis commencèrent à travailler sur le moyen de le neutraliser. Chavez, mis au courant des réunions que ses opposants tenaient à l’ambassade des Etats-Unis à Bogota prit contact avec les autorités américaines pour les rassurer sur ses intentions. Celles-ci confiantes en leurs capacités ne le reçurent pas favorablement et choisirent la solution du renversement. Lorsque celui-ci échoua radicalisant Chavez au point d’appeler au cours d’un discours aux Nations Unies devenu fameux, le président des Etats-Unis de l’époque, Georges W. Bush, le diable.

De la même façon les actions violentes de la France en Afrique, en particulier son dernier coup contre les pays du Bassin du Lac Tchad à travers Boko Haram ont radicalisé les camerounais et poussé le président Biya en général mesuré, à un éloignement prononcé vis-à-vis de celle-ci. C’est normal car c’est sa tête que Paris veut après tout.Il sait que si ce coup réussissait, ce n’est pas une retraite dorée qu’on lui aurait réservée. Et au lieu d’essayer de sérieusement négocier le Cameroun en engageant avec lui et les autres pays en captivité un dialogue franc sur les sujets de fond à savoir le Franc CFA, le remboursement de la dette de la France aux pays africains, le démantèlement de ses bases militaires, Paris pose des actes de flatterie d’une apparence puérile qui ne trompent personne. Même les lycéens au Cameroun savent que la France n’est pas sincère. Seuls leurs dirigeants croient peut-être à l’efficacité de leur approche.

En plus de ces attitudes coupables, la cour assidue que la France fait au Cameroun montre que contrairement aux discours officiels que la France a plus besoin du Cameroun que le Cameroun aurait besoin d’elle. Le Cameroun est riche en ressources naturelles, contrairement à la France et peut se passer d’elle en traitant avec d’autres puissances. Celle-ci ne peut se passer ni du Cameroun ni de l’Afrique Centrale. C’est parce qu’elle joue sa survie que ses manœuvres devraient être prises avec la plus grande méfiance.

Le cœur des dirigeants français reste plein de colère et de meurtre après l’échec cuisant de Boko Haram. Cela n’est peut-être pas visible pour tout le monde parce sa classe dirigeante a développé une discipline qui lui permet de dissimuler ses véritables sentiments et intentions dans des discours apparemment bienveillants. Ils n’aiment pas du tout les courbettes et l’humiliation que leur imposent les déplacements fréquents sur Yaoundé mais ils savent qu’ils n’ont pas de choix pour le moment. Qu’on ne se trompe donc pas, la France reste un ennemi mortel pour le Cameroun, maintenant même plus qu’avant.

On ne peut absolument pas faire confiance au gouvernement français tant qu’il pratique sur nous les méthodes de nazisme financier appris de leurs maitres allemands. Si la France veut mous montrer son amitié qu’elle mette sur la table le problème du Franc CFA, des accords et des bases militaires, de l’accaparement des ressources naturelles des pays africains et de sa dette vis-à-vis de ces pays.  C’est à partir de cela que l’on jugera son sérieux.

Et comme le naturel ne s’éloigne vraiment jamais, il n’est pas impossible que comme dans les cas de Maurice Papon  et de René Bousquet, Christine Robinchon qui a offusqué les camerounais et le pouvoir de Yaoundé avec lequel Paris veut réchauffer les relations soit sacrifiée et rappelée en France.

Maurice Papon a été secrétaire général de la préfecture de Gironde chargé des affaires juives entre 1942-1944. Ancien ministre du budget de Raymond Barre, il a condamné le 2 Avril 1998 pour complicité  de crime contre l’humanité. René Bousquet quant à lui était Secrétaire General de la police nationale d’Avril 1942 à Décembre 1943, ami de François Mitterrand, inculpé aussi en 1991 pour crimes contre l’humanité avant d’être assassiné d’une façon qui a amené certains a se demander s’il n’en savait pas trop sur la politique française. Le problème avec ces deux cas c’est que la classe politique française connaissait le passé de ces personnalités qu’elle n’a laissé tomber que lorsque l’affaire est devenue publique.  Voila donc le genre d’interlocuteurs que nous avons en face de nous.

Gabriel Makang pour le Sphinx Hebdo


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