Magazine Journal intime

L'hymne à la belotte

Publié le 05 juin 2008 par Nitchioule
Ils entrent au compte-goutte. Les pintes de bière s'alignent sur le comptoir. Quand ils sont assez nombreux, ils s'installent aux tables par groupe de quatre et le tournoi commence. " On se la fait en 1000 ? ", demande Alex. Concentrés, ils jouent. Les parties s'enchaînent, mais la grande aiguille tourne et le bar se remplit. " T'avais encore du pique, pourquoi t'as coupé ?", "En fait, c'est quoi déjà l'atout ?", " Et l'as, ça vaut combien ?". Le jeu ne capte plus leur attention. Sans cesse, ils tournent la tête vers la porte d'entrée. Ils s'interrompent pour dire bonjour. Se lèvent pour commander une nouvelle tournée. Enfin, la famille arrive. Les jeux de cartes disparaissent des tables.
Chacun prend place de manière à voir la scène. Popette grimpe sur son tabouret, bien accrochée à sa guitare. " Les hommes du Pont des Arts me tiennent sans amour, mais ne jurent que par moi et naïve je les écoute..." Elle chante aux murs. Elle ne peut pas croiser les regards perlés de son public. Certains gardent la tête baissée. D'autres ont les yeux fixés sur elle avec un sourire figé. D'autres enfin détournent le visage. Chaque chanson est un souvenir. Popette prend une grande inspiration. "Avant l'entracte, ma dernière composition, l'hymne à la belotte." Le public se raidit, le silence est total. Elle chante :
"Cette chanson est à toi,
Depuis le temps qu'j'te la dois.
C'était un pari entre potes,
D'écrire l'hymne à la belotte.
On le chantera tous en choeur
Quand la piquette fera fureur.
On posera nos trèfles au Père Salaud
Puisque t'es sur le carreau.
C'est vraiment pas de pot
Qu't'y aies laissé ta peau.
Moi, j'arracherai ton étoile,
Quand on ira courir les toits.
Sur la montagne Sainte-Geneviève
On en a vu des levers de soleil.
Tu nous racontais tes voyages
Et on gueulait :
'Manala'.
Ravive-moi ce feu de joie,
Pour tes compagnons qui ont froid,
Qu'on danse le rock toute la nuit,
Avant d'en revenir à la vie.
C'est vraiment pas de pot
Qu't'y aies laissé ta peau.
Moi, j'arracherai ton étoile
Quand on ira courir les toits.
Carte posée, carte mise,
Les verres sont vides au Teddy's.
Borsalino dans la main gauche,
Tu tires ta révérence."

Les dernières notes s'éteignent. Assis, debout, appuyés contre le mur, entassés sur les banquettes, ils sont tous là.

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