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« Le Sonnet du trou du cul » A.Rimbaud et P.Verlaine

Publié le 23 février 2016 par Lucie Léanne @lucieleanne75
du cul

Le sonnet de quoi ?

Chers lecteurs, en cette période sombre, genre trou noir, je vous propose un poème de circonstance : le Sonnet du trou du cul, écrit en 1871, par Arthur Rimbaud et Paul Verlaine.
C’est un sonnet que j’ai découvert, grâce à un ami en faculté de lettres, pendant un cours d’ancien français où je m’endormais :
-Eh ! Lucie…Tu connais le Sonnet du trou du cul, de Verlaine et de Rimbaud ?
-Oooh ! Non; fais voir !
De son classeur, il m’a sorti le poème; ça m’a réveillée et mise de bonne humeur pour toute la journée.

Sonnet du trou du cul : poème profond

Obscur et froncé comme un œillet violet
Il respire, humblement tapi parmi la mousse
Humide encor d’amour qui suit la fuite douce
Des Fesses blanches jusqu’au cœur de son ourlet.

Des filaments pareils à des larmes de lait
Ont pleuré, sous le vent cruel qui les repousse,
À travers de petits caillots de marne rousse
Pour s’aller perdre où la pente les appelait.

Mon Rêve s’aboucha souvent à sa ventouse ;
Mon âme, du coït matériel jalouse,
En fit son larmier fauve et son nid de sanglots.

C’est l’olive pâmée, et la flûte câline ;
C’est le tube où descend la céleste praline :
Chanaan féminin dans les moiteurs enclos

Ça vous plaît ? Vous êtes choqués ? Ah…C’est de la poésie, de l’art.
Le Sonnet du trou du cul est un sonnet d’amour entre deux hommes : à la première lecture, on comprend  le sujet; mais il faut lire entre les lignes, pour en saisir toutes les subtilités : images poétiques, allitérations, références religieuses…le tout écrit en alexandrins.

A l’époque, les deux poètes maudits ont voulu  pasticher les sonnets d’Albert Mérat, mais surtout choquer la morale bourgeoise française avec l’homosexualité, « la pédérastie ». Diantre ! Des homosexuels ; c’est dégoûtant ! (rire)
Remarquez, depuis on n’a pas tellement évolué. La largeur de vue n’est pas vraiment…panoramique.

Quel poète, de nos jours, peut s’éclater en décrivant aussi bien son trou de balle ?
Aucun.

Rimbaud et Verlaine :  une histoire de trous

Pourquoi n’étudie-t-on pas le Sonnet du trou du cul au lycée ? Subtile question.
On apprend toujours le poème de Rimbaud : Le Dormeur du val (1870)

C’est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent ; où le soleil de la montagne fière,
Luit : C’est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,
(….)
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit

Pareil. A cause de la morale judéo-chrétienne.
Quand même, si les élèves demandaient gentiment à leur professeur, sans forcer, tout en délicatesse, je suis sûre que ce sonnet rentrerait dans les anales scolaires (« anales » ou « annales » ? Avec la nouvelle réforme de l’orthographe, je m’y perds).

Les trous ont toujours choqués. Regardons les deux poèmes :

Dans Le Dormeur du val, le type a deux trous au côté droit; dans le Sonnet du trou du cul, il en a juste un au milieu ; le professeur ne va pas chipoter pour si peu. Allons, allons…il faut vivre avec ses moeurs, son temps.

Alors, chers lecteurs, toujours choqués ? Prenez un suppositoire, ça ira mieux.


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