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Kouam Tawa | Ici Elle parle | Ici Elle chante

Publié le 02 avril 2016 par Angèle Paoli

Kouam Tawa, Ici Elle parle (et sa parole est chant) :
J' aurais aimé être une muse. Celle à qui l'on pense, celle dont on rêve, celle que l'on désire.
J'aurais aimé être une muse. Celle qui donne courage, celle qui donne force, celle qui donne fierté.
J'aurais aimé être une muse. Celle qu'on chante le jour, celle qu'on chante la nuit, celle qu'on chante partout.
J'aurais aimé être une muse. Edith de Kotto Bass, Adj de Black So Man, Olivia de Sam Mbendé.
J'aurais aimé être une muse. Sophia de Dina Bell, Aïcha de Khaled, Amida de JB Mpiana.
J'aurais aimé être une muse. Cécile de Pasto, Adjatou de Pépé Kallé, Pamela de Tchico Tchicaya.
Et bien d'autres encore, et bien d'autres encore...
Je suis celle qu'on n'a jamais aimée pour ce qu'elle est, mais pour
ce qu'on aurait aimé qu'elle soit.
Ici Elle chante (et son chant est parole) :
C omme une source elle s'est donnée. Aux nobles et aux roturiers, aux notables et aux serviteurs, aux nantis et aux pauvres. Gracieusement. Comme une source elle s'est donnée et comme les lamantins les grands et les petits l'ont bue. Chacun son jour. Chacun son tour. Avidement.
Comme un soleil elle était dans le quartier. Brillant pour tous pareillement. Qui avait bu de sa lumière en était fier et cette fierté rejaillissait dans ses gestes, sur son chemin, dans sa maison, sur son travail. Pour beaucoup elle était la nouvelle source du bonheur, la source secrète.
Étendue dans sa bière d'acajou elle dort, et ne coulera plus pour personne, et ne brillera plus pour personne. Triste est le quartier, tristes sont les buveurs. Jour sans soleil. Nuit sans lune. Et pleurent les nobles et les roturiers, les notables et les serviteurs, les nantis et les pauvres.
La tristesse est dans les yeux, une tristesse non feinte. On pleure la source qui a tari en se disant que si elle est morte de ce que la rumeur soupçonne, il ne faudra pas beaucoup de temps pour que sa nuit entraîne celle du village. On pleure, on pleure, on pleure. On pleure vraiment la généreuse.
Elle(s), LansKine, Collection " Ailleurs est aujourd'hui ", 2016, pp. 29-30.
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