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Christine Guinard | De l’autre côté

Publié le 06 avril 2016 par Angèle Paoli

DE L'AUTRE CÔTÉ T unepeuxpasytoucher, tupassespareffraction timide, l'assemblage figé mélancolique du miroir se brise en mille morceaux, du voile déchiré, du ciel qui s'évase. Christine Guinard, " I. Voguer " in
Tu accèdes à l'autre côté ; la roche à perte de vue, la roche rouge et brune des cratères disséminés sur tout le périmètre de l'île. La terre râpeuse qui dessine graduellement le chemin à travers les buttes, les rochers, au gré du vent. La brise est vive par moments, tout droit issue du levant.
Suivant les signaux semés sur la sente, à l'aveugle, tu parcours l'air de rien la distance qui te sépare du monde organique, du matériau brut venu de la terre même. Le sol épais te maintient fermement accroché aux origines du paysage, te soutient, et c'est ainsi que tu accèdes progressivement à l'ouverture immédiate, sans détour, de l'horizon aux quatre vents.
Embarqué par la pureté de l'air, par l'apparence laiteuse, lestée même de l'atmosphère, tu évolues toujours sur le terrain propice, celui qui te contraint, qui, te gardant relié à la matière, te propulse innocemment dans l'ampleur autrefois inquiétante de l'espace ; te retient en quelque sorte et ainsi, guide ton envol.
Aujourd'hui cet univers, incarné au paysage volcanique de l'île, emportera jusqu'aux étoiles ton souffle qui s'apaise et s'amplifie. Le vent chaud, le sable, la friabilité accidentée du sol de lave brune, la lumière ici, la lumière qui contient enfin les sensations diverses initiées par le chemin, le feu, le vert tendre des buissons d'olives, l'air doux qui balaie par intermittences l'amas de brumes indécises qui voilait l'horizon, l' évidence t'ouvrent la voie.
Si je pars comme un feu, l'Arbre à paroles, Collection Résidences dirigée par Pierre-Yves Soucy, B-4540 Amay, 2016, pp. 21-22.
Christine Guinard   |  De l’autre côté


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