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L’Amazonie, le Mexique, la Bolivie et le Paraguay revisités

Publié le 05 mai 2016 par Icipalabre

1507-1Quatre volumes consacrés à l’Amérique latine viennent enrichir une collection originale, « Lignes de vie d’un peuple », aux Ateliers Henry Dougier : Les Amazoniens (écrit par Nicolas Bourcier), Les Mexicains (Frédéric Saliba), Les Boliviens (Frédéric Faux) et Les Paraguayens (Laurence Graffin).

Les deux premiers auteurs sont journalistes au quotidien Le Monde, le troisième correspondant du Figaro, la quatrième reporter à la télévision, tous des connaisseurs du terrain.

Jusqu’alors, la collection comptait un seul titre latino-américain : Les Brésiliens (Marie Naudascher). C’est donc un petit événement dans la mince bibliographie destinée aux lecteurs qui souhaitent découvrir la région autrement qu’à travers les guides touristiques (par ailleurs fort utiles aux voyageurs). Autrement, c’est le cas de le dire, car Henry Dougier est justement le créateur des éditions Autrement (1975-2011), qui ont conçu beaucoup d’angles et approches nouvelles pour éveiller notre curiosité.

L’idée de la collection est de décrire le mode de vie et les mentalités d’une population, sans hésiter à s’interroger sur son identité – sujet glissant, comme on sait, à l’heure où l’on voit se multiplier les dérives des sursauts ou replis identitaires. La réponse à ces interrogations repose en grande partie sur la polyphonie, sur la prolifération d’entretiens et portraits, qui parviennent à conférer à ces petits livres de 140 pages (mieux que 140 caractères) un mélange inhabituel de légèreté et densité. Ils se lisent facilement, mais ils colportent leur bonne dose de stimulant pour la réflexion et la rêverie.

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Le plus étonnant, sans doute parce qu’il s’agit du moins connu des quatre pays ou régions abordées, est celui consacré au Paraguay.

Le va-et-vient entre passé et présent, individus et société, Asuncion (la capitale) et la province, social et culturel, tout s’enchaîne et s’enchevêtre avec une empathie communicative, trait partagé par tous les auteurs, qui se doublent de passeurs, voulant toucher le lecteur et l’entraîner vers ses propres découvertes. La lecture donne parfois des ailes.

La Bolivie est aussi un pays enclavé, « méditerranéen » au sens sud-américain, sans accès à la mer, devenue la revendication nationaliste susceptible de refaire l’unité autour d’un leader en perte de vitesse. L’auteur décrit à merveille El Alto, véritable capitale aymara perchée au-dessus de La Paz, dont l’essor prodigieux attire désormais les artistes et inspire des écrivains.

L’identité d’Evo Morales est un sujet controversé, mais ce qui ne l’est pas, en revanche, est le fait que le premier président indigène d’Amérique latine est le Mexicain Benito Juarez (1806-1872), d’origine zapotèque. L’oublier au profit du Bolivien est particulièrement fâcheux en France, alors que Juarez a battu à plate couture le corps expéditionnaire de Napoléon le petit.

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Les Mexicains prétendent encore, sur un rythme de danzon, que leur sort serait différent si Benito Juarez n’était pas mort…

Histoire et actualité sont nouées de manière inextricable dans cet immense pays d’Amérique du Nord, adossé aux Etats-Unis pour le meilleur et pour le pire.

L’ambivalence, la complexité, caractérisent le Mexique et suscitent parfois des réponses ou des interprétations simplistes. Ce n’est pas le cas, ici, lorsqu’on brasse un vaste champ, de l’économie à la gastronomie, en passant par les événements sanglants qui font la « Une » des gazettes.

L’Amazonie célèbre au quotidien les noces de la nature et du rêve, de la diversité et du dépouillement, de l’apesanteur et de l’enracinement. Même circonscrit aux Amazoniens du Brésil, le petit volume qui leur est consacré donne le vertige, car on plonge dans une immensité géographique que le regard ne peut pas appréhender et dans un éventail de problématiques défiant tous les spécialistes.

Comme « l’humanisme réel », l’humanité concrète est au cœur du sujet, il est difficile de sauvegarder l’optimisme, même celui de la volonté, lorsque on se penche sur le rapport de forces : 25 millions d’habitants, dont à peine un demi-million d’Amérindiens, qui répugnent à vivre en marge de la civilisation.

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Oui, il y a péril en la demeure, danger pour la planète. Au lieu de pleurer, on peut commencer par lire, réfléchir, peut-être y aller jeter un coup d’œil, si on en a les moyens. Mario de Andrade, le chef de file du modernisme brésilien, n’hésita pas à évoquer sa découverte du Nord du pays comme les déambulations d’un « touriste apprenti ». Alors, pourquoi pas ?

Les Amazoniens de Nicolas Bourcier, Les Boliviens de Frédéric Faux, Les Mexicains de Frédéric Saliba et Les Paraguayens de Laurence Graffin, Ateliers Henry Dougier, 114 pages, 12 euros. Disponibles en versions e-book et papier.


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