Magazine Journal intime

Grève de la Faim (18/10/2005)

Par Pastis51

"On était le 18 octobre 2005, soit sept ans en arrière. L'oppression benalinienne était à son paroxysme. Le pays sombrait dans un calvaire infernal. La situation des droits de l'Homme était chaotique. La dictature resserre son étau et tisse sa toile machiavéliquement.

L'Opposition tunisienne a décidé d'agir contre la détérioration vertigineuse des libertés individuelles et associatives. Une grève de la faim illimitée est entamée le 18 octobre 2005.

Hamma Hammami, à l'époque Porte-parole du POCT (Parti communiste ouvrier tunisien, Ahmed Néjib Chabbi, Secrétaire général du PDP (Parti démocratique progressiste), Abderraouf Ayadi, Secrétaire général du CPR (parti du Congrès pour la république), Mohamed Nouri, Président de l'Association Internationale de Soutien aux Prisonniers Politiques (AISPP), Ayachi Hammami, Président du Comité de soutien à Me Mohamed Abbou et Secrétaire général de la section de Tunis de la Ligue Tunisienne pour la défense des Droits de l'Homme (LTDH), Samir Dilou, membre du bureau de l'AISPP et du Comité de défense de Me Mohammed Abbou, Mokhtar Yahyaoui, magistrat et Président du Centre pour l'Indépendance de la Justice (CIJ), et Lotfi Hajji, Président du Syndicat des Journalistes Tunisiens (SJT) ont entamé une grève de la faim illimitée afin de tirer la sonnette d'alarme et attirer la conscience collective internationale quant au gouffre dans lequel sont englouties les libertés humaines fondamentales en Tunisie.

Le sommet SMSI, une aubaine pour secouer l'opinion publique et internationale.

C'est autour d'un dîner chez Ahmed Néjib Chebbi que l'idée de la grève de la faim a germé dans l'esprit des opposants. Le Sommet Mondial sur la Société de l'Information était, pour eux, le moment propice pour médiatiser cette prise de position.

Durant l'ère de Ben Ali, l'information était cadenassée. Les médias étaient muselés et Internet était sous contrôle. L'opposition réfléchissait à la manière avec laquelle elle procèderait pour assurer la médiatisation de la grève de la faim. Le SMSI était là. Un sommet qui a lieu au cœur de Tunis, sous le système despotique de Ben Ali, et où tout le monde, y compris les médias et les opposants, devront faire semblant et faire croire à l'opinion internationale, que les Tunisiens vivent dans l'Eldorado, que l'information est accessible et que les droits humains universels sont garantis et respectés. Une comédie en somme pour masquer ce que le peuple tunisien endure depuis des années.

Le Collectif 18 octobre : quand l'alliance Islamistes/Modernistes était tangible.

La grève de la faim était, d'abord, prévue le 11 octobre, mais pour des raisons d'organisation, on la reporte au 18 octobre. Broyée et comprimée par l'échec cuisant des élections municipales de mai 2005 et par la énième rectification constitutionnelle que l'ancien président a effectuée pour avoir un quatrième mandat, l'opposition tente bien que mal de se ressaisir et de s'allier pour affronter le dictateur. Or, le clivage idéologique et les aspirations hétéroclites des opposants piétinaient cette alliance et les empêchait de former un réel front contre le RCD.

Néanmoins, un événement marquant a fait que l'alliance Islamiste/Laïcs était possible. L'incarcération arbitraire de Mohamed Abbou, pour ses articles virulents, a ébranlé l'ordre des choses. Pendant plus de 50 jours, les avocats, toute appartenance politique et idéologique confondues : nationalistes, laïcs, islamistes, modernistes, se serrent les coudent, mettent la main dans la main et investissent la maison de l'avocat.

N'a-t-on toujours pas dit que l'union fait la force ? Pour renverser le pouvoir absolu de l'ancien régime, l'Opposition a compris que le salut n'est possible que dans la solidarité.

La grève est entamée sous une haute surveillance policière. Un dispositif policier massif encercle les locaux où a lieu la grève. L'accès est interdit à la société civile, aux médias et aux supporters des grévistes. Même les trois médecins qui désiraient ausculter les grévistes de la faim étaient empêchés de pénétrer dans les lieux et étaient même humiliés. Il fallait la visite d'une délégation de la présidence de l'Union européenne pour que la levée du siège ait lieu."

Source : Journal LeTemps


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