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Jean-Charles Vegliante, Où nul ne veut se tenir par Joëlle Gardes

Publié le 05 mai 2017 par Angèle Paoli

Q ui effectivement voudrait se tenir dans ce " noir " où on se déba[t], en plein soleil ", comme le dit le dernier poème du recueil Où nul ne veut se tenir de Jean-Charles Vegliante, et dont le dernier vers résume la tonalité : " comme si une boue basse nous tenait ". Nul ne veut s'y tenir et pourtant il le faut, et il faut " oublier l'effroi, / et l'injustice, qui sera toujours là ". Si, dans le " Journal en vers ", rédigé en mars 2015, qui clôt l'ensemble, l'injustice naît du mal des " semblables " qui " traitent, vendent, tuent le bétail humain [...] mettent en scène égorgements, bûchers, crachats, destructions avec une exquise maîtrise des codes ", elle est plus fondamentalement notre condition d'êtres soumis au temps. C'est dans la réflexion sur l'érosion à laquelle nous ne pouvons échapper que réside l'unité de ce recueil fait de plusieurs parties. Se succèdent " Avant-scène ", " Suites_survie ", " Après ", " Sonnets pour ne pas pleurer " et " Journal (en vers), 2015 ". Le passé y est le plus souvent convoqué, avec le souvenir, celui de l'enfance qu'il faut " déglutir ", celui de la femme aimée (" il me semble avoir encore au bout des doigts / la soie de ta peau vivante "), celui des amis dont on s'éloigne " dans le son d'un été " :

" Le passé sans fin nous déchire alors

ce matin tout le passé nous bascule

en arrière vers la fosse bleue

le museau effrayant d'être bête. "

celui des disparus : " tu n'es plus rien que ces fines particules ". Nous ne pouvons empêcher qu'" affleure en nous des fois un rauque langage d'avant. "

Ce recueil est profondément - et c'est son grand intérêt - une méditation d'homme dans sa vieillesse : " ainsi sommes-nous vieux / sommes-nous ", dans un " corps en morceaux qui commence à partir sans moi ", dit le poète. Qui est donc en définitive celui qui survit, qui abrite en lui un " toi " qui " ne [nous] aime pas au point de partir avec [nous] " ? L'adversaire auquel s'adresse une série de quintils, c'est le " petit cancrelat / de l'âme " et cet autre qui nous habite :

" ou bien c'est comme en soi noyée de silence

Joëlle Gardes
D.R. Texte Joëlle Gardes
pourTerres de femmes

Jean-Charles Vegliante, Où nul ne veut se tenir   par Joëlle Gardes


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