Magazine Journal intime

Je suis nordique

Publié le 30 juin 2017 par Claudel
Catherine PoulainJe suis nordique. Je m’en doutais, mais, malgré le choix de mes destinations, je n’avais pas vraiment réalisé. Qu’il s’agisse de voyages ou de lectures, ce qui m’attire c’est le nord. Plus précisément tout ce qui se situe au nord du 35e parallèle. 
Entre les palmiers et les sapins, je choisis les sapins.Entre le sable trop chaud, et la mer froide, je choisis la mer.
Par contre je n’aime pas les extrêmes. Je ne veux n’avoir ni trop chaud ni trop froid. Et de connaitre la vie de ceux qui subissent ces extrêmes, j’avoue que ça ne m’intéresse pas trop. Si donc il m’arrive d’aller en Floride ou en Andalousie, ce sera pendant les mois de mon hiver québécois. Leurs 40 degrés, très peu pour moi. Quand j’ai été en Alaska, ce fut en août, leurs moins 40 ne m’intéressent pas non plus. 
Entre : 
«Les terres afghanes ne sont que des champs de bataille, arènes et cimetières. Les prières s’émiettent dans la furie des mitrailles, les loups hurlent chaque soir à la mort, et le vent, lorsqu’il se lève, livre la complainte des mendiants au croassement des corbeaux.» 
et 
«Il fait très beau a Anchorage. J’attends derrière la vitre. Un indien me tourne autour. Je suis arrivée au bout du monde. J’ai peur. Et je réembarque dans un tout petit avion. L’hôtesse nous donne un café et un cookie et puis on s’enfonce dans la brume, on disparaît dans le blanc et l’aveugle, tu l’as voulu ma fille, ton bout du monde. L’île apparaît entre deux échappées de brouillard – Kodiak. Des forêts sombres, et puis la terre brune et sale qui parait sous la neige fondue. J’ai envie de pleurer. Il faut aller pêcher maintenant.»
je n’ai pas trop longtemps hésité.
J’aurais voulu choisir le style plus classique, le français plus soigné. J’ai oscillé entre le nom Yasmina Khadra plus connu et celui, tout nouveau, de Catherine Poulain. Que leurs romans aient remporté des prix n’a pas compté dans mon choix, mais je dois avouer que j’ai un petit faible pour un prix qui s’appelle prix Henri-Queffelec, qui pour moi signifie la Bretagne, la mer. 
Entre le désert et la mer, je choisis la mer. Entre les champs de bataille et les tempêtes de neige, je choisis la neige.Entre un tigre et un ours, je choisis l’ours.
Je sais, je n’ai pas à choisir, je peux très bien lire les deux. Je lirai probablement les deux. Mais depuis deux mois que j’ai le tout petit à la couverture bleue, et cinq fois je l’ai ouvert, cinq fois, j’ai lu trois-quatre pages alors que l’autre, là, même en numérique, je n’ai pas hésité une seconde. Dès la première phrase : « Il faudrait toujours être en route pour l’Alaska », je savais que j’allais être infidèle et lâche. Je me suis précipitée. J’ai dévoré goulûment. 
Je reviendrai sûrement à l’autre roman, à la couverture de ruines et de femmes voilées. Par curiosité, pour voir ce que les lectrices de mon cercle de lecture lui trouvent tant. Mais moi, réussirai-je à vendre ma pêcheuse en Alaska? À des caravaniers qui, comme moi, ont visité Homer, ont vu les flétans, ont vu les grizzlys. Qui comme moi, sont plus nordiques. Sûrement. Et qui, comme moi, peuvent être en colère contre les humains qui tuent des humains, mais qui pleurent quand ils frappent un chevreuil ou qui seraient prêts à adopter un ourson abandonné. Oui, à ces voyageurs, mais aux lectrices et lecteurs qui me lisent ou m’écoutent, je n’essaierai même pas. Je ne suis pas bonne vendeuse, je peux juste dire qu’entre Les hirondelles de Kaboul et Le grand marin, j’ai choisi la pêcheuse de l’Alaska.
Parce que je m'y voyais. Ou plutôt m'y revoyais.Parce que je suis nordique. Et j’assume.
site de mon voyage au Yukon-Alaska>>>

Retour à La Une de Logo Paperblog