Magazine Journal intime

Episode#6

Publié le 14 août 2017 par Lesenquetesdantoinette

ujourd'hui, c'est jour de lessive et rétrospective d'enquête. De retour dans mon appartement, je passe en revue les deux derniers mois. Cinq clients et cinq affaires plus bizarres les unes que les autres. Un tournant s'annonce dans ma toute jeune carrière.

Eh oui, j'ai décidé de réserver la solution de mes enquêtes aux seuls " Antoinautes ". On ne peut faire confiance à personne aujourd'hui. Et comme j'ignore où tout cette histoire va nous mener... Il n'est pas trop tard pour nous rejoindre. Un simple examen de personnalité permettra d'accéder à la communauté des Antoinautes. Je lis très bien la personnalité dans l'adresse mail et le prénom.

- Recevez la solution de l'enquête en cours par mail.

- Disposez d'un espace abonné. Vous et vous seul accéderez aux solutions des enquêtes répertoriées dans cet espace.

- Devenez le destinataire privilégié de bonus et de surprises.

- Bénéficiez d'une inscription systématique aux concours.

De retour du Havre de paix à La Marre, j'ai envie de faire le point sur mes dernières aventures. Après une bonne nuit de sommeil, je me réveille l'esprit englué par la journée de trajet.

Un thé fumé, mon peignoir à pois et Catson, mon chat, sur mes genoux, je pose mes pieds sur le rebord du balcon. C'est étrange de ne plus voir le paysage défiler devant moi. Mon regard se perd sans rencontrer d'obstacle. Vue dégagée sur une matinée d'août ensolleillée, le moment idéal pour dresser le bilan de mes débuts de femme de ménage à la CLEAN, l'agence de nettoyage de M. Anselme. Corinne, la secrétaire me donne des ordres de mission. Ça me plaît bien. Je voyage, je remplis des objectifs différents. J'aide les particuliers, les collectivités, bref je rencontre du monde. Mais pourquoi mes clients affrontent les pires aléas ? J'ai un sixième sens pour attirer les embrouilles...

1re affaire : Miss Keptown s'est envolée.

Déjà j'aurais dû me méfier. Mon patron, M. Anselme qui me propose de choisir entre deux clientes. Une idée bien tordue ! Mais rien n'effraie Antoinette ! Allez hop ! Au travail ! Plusieurs indices m'ont tout de suite mise sur la piste du départ de Miss Keptown. Le petit mot laissé sur la table, son uniforme d'hôtesse de l'air posé sur le lit et la babiole cassée dans l'entrée. J'ai répertorié tous les preuves ici solution épisode#1. Nous sommes d'accord, il s'agissait d'une disparition volontaire, juste précipitée.

2e affaire : Allez les blancs !

Ensuite, M. Anselme m'a envoyé près d'Amiens. Toute la ville de Boves s'agitait à cause de l'inauguration de la nouvelle salle de sports. Le maire, débordé, avait demandé de l'aide pour superviser l'ensemble. Personne n'avait mesuré le raz de marée causé par la venue d'un invité spécial : d'Emmanuel Bourgaud, le joueur de foot du SC d'Amiens. Nous l'avons beaucoup attendu. Et il n'est jamais arrivé. Le garagiste de Glisy, le village d'à côté, a retrouvé sa voiture sur le bas-côté de la route avec son téléphone sur son siège et la portière ouverte. Il était tout près. Je l'ai découvert qui participait à un enterrement de vie de jeune fille solution épisode#2. Pas de quoi fouetter mon chat. Mais toute cette histoire en dissimulait une autre. Il était tout de même question de disparition, encore une fois...

Pendant la modeste fête d'enterrement de vie de jeune fille, l'attaquant du SC Amiens m'a laissé sa clef de son Audi TT avec son étrange porte-clefs.

Il prétexte un voyage en avion pour rejoindre sa petite amie. Je n'y ai pas cru une seconde. La CLEAN, même si elle est une agence de services reconnue se voit rarement confier des voitures ! Il faudra que j'en parle à M. Anselme : savoir ce qui rentre dans mes attributions ou pas. J'ignore pourquoi, l'accumulation de preuves, la précipitation, je sentais mes clients de plus en plus menacés, persécutés. M'est avis que ce véhicule recèle encore des indices... Solution épisode#3

Episode#6

Tout s'est enchaîné très vite. Je voulais aller questionner M. Anselme et la CLEAN. Il s'était absenté. J'ai dû me rendre à La Marre, un village dans le Gard. De prime abord, le séjour m'a ressourcée. Un certain Raplaplado m'a même appris la méditation. Quand vous me connaîtrez mieux, vous comprendrez que ce n'est pas une mince affaire. Un maître Yogi à la tête d'une communauté accueille les gens en recherche de sens, de pause dans leur vie trépidante. Il avait besoin de moi pour remettre de l'ordre dans son centre, un grand mas de Provence perdu dans la garrigue efflanqué de dépendances. Un lieu hors du temps, où l'on s'appelle par son nom indien et où on se relaxe dans la montagne. Il était assisté de son intendante Poupinette. Et là encore, une disparition en apparence volontaire. En apparence uniquement. Solution épisode#4

Là, le plumeau qui s'agite dans ma tête à chaque ennui m'annonce que quelque chose de grave s'est produit. Maître Raplaplado a été retrouvé dans un endroit très particulier (solution épisode #5) blessé et grogui. Aujourd'hui, la question en suspens est : " qui est le coupable de l'agression de Raplaplado ? " J'ai ma petite idée. Mais je voulais interroger le maître yogi pour m'en assurée. Seulement M. Anselme m'a contrainte de rentrer sur le champ. J'ai d'abord cru qu'il souhaitait me renvoyer, mais il avait l'air plus inquiet qu'en colère au téléphone. Il est temps d'obtenir des explications.

ai rendez-vous à la CLEAN en fin d'après-midi. Quand mon patron m'a appelée au téléphone, il avait l'air rassuré que je sois rentrée

Une feuille pliée en quatre se glisse sous porte. Tout le monde a le réflexe de le lire le papier. Moi, j'ouvre et je surprends l'inspecteur Verrene en train de déposer deux grosses malles de linge chiffonné.

" Bonjour !

- Désolé. C'est indélicat, mais je suis déjà très en retard. Ma voiture ne démarre plus et je dois prendre le bus.

- Je comprends.

- Tout est écrit sur le mot. À tout à l'heure ! "

L'inspecteur emprunte quatre à quatre l'escalier pendant qu'il finit sa phrase.

Zut ! Il aurait pu prendre ma voiture. Mon rendez-vous avec M. Anselme est programmé ce soir à 18 h. Mes seules obligations du jour consistent à caresser mon chat et ressasser mes histoires. Je me précipite à la fenêtre. L'inspecteur arrive déjà dans la cour et s'apprête à sortir du lotissement.

" Inspecteur, je vous prête ma voiture. L'Audi TT blanche, juste là. "

J'appuie sur la commande d'ouverture centralisée du porte-clefs. La voiture cligne des feux pour indiquer sa position à Verrene. Je lui lance le trousseau. Il me crie un merci.

Deux malles de chemises froissées pour m'occuper jusqu'à mon rendez-vous avec M. Anselme. Au travail. Dans les vapeurs du fer à repasser, j'essaie de remettre de l'ordre dans les indices.

" Alors Catson, qu'en penses-tu ? Trois individus qui disparaissent dans des conditions bizarres pour des destinations mystérieuses.

- Mawwou

- Je suis d'accord avec toi. Ça fait beaucoup, deux de trop comme on dit. Et puis ce mot qui revient souvent aussi A. B. R. I. S ....

- Mawawa.

- M. Anselme qui ne s'étonne pas.

- RRRRRRRRRR, ronronne mon chat en se frottant sur mes jambes.

- Et moi qui croyais que tu t'intéressais à toutes mes histoires. Tu as faim, c'est ça ? "

En guise de réponse et après avoir épuisé le répertoire des meilleurs acteurs pour mimer l'agonie, Catson se contente de se contorsionner sur le dos comme un ver hystérique.

" OK, pas la peine de te mettre dans cet état. Crevettes et miettes de crabe pour M. Catson. "

J'ouvre la porte du placard. Boîtes de crevettes, de saumon, de crabes. Mon chat aime les aliments roses. Je sais, c'est bizarre et c'est comme ça.

Une fois l'animal rassasié, je prends un bain moussant et crémeux. Nul doute que M. Anselme va botter en touche. S'il le faut, je m'enchaînerai à son bureau.

Episode#6

Verrene m'a promis d'être rentré avant 18 h. À 17 h 45, je reçois un message sur mon portable.

" Je vous attends dans 5 minutes sur le parking "

Ah bon ? Je suis sûre d'être à l'heure, une poignée de minutes me séparent de l'agence. J'enfile une veste, et mes chaussures. Une dernière caresse à Catson et je descends les deux étages qui me séparent du rez-de-chaussée. J'entends l'Audi avant de l'apercevoir. La conduite nerveuse et maîtrisée de Verrene m'impressionne.

Il stoppe le véhicule à quelques centimètres de moi et en sort en trombe.

" Antoinette, il faut que je vous montre quelque chose !

- Mais je suis pressée là, j'ai rendez-vous à la CLEAN, je réponds, abasourdie et Verrene, excité, enjoint :

"Je vous conduis. Allez, montez et attachez votre ceinture"

Démarrage en trombe, je m'accroche à mon siège et à la poignée au-dessus de la portière. Après deux ou trois crissements de pneu, je reprends une respiration normale et parviens à prononcer une suite de mots cohérente :

"Qu'est-ce qui vous met dans cet état ? Votre nouvelle affaire ou la perspective de porter une chemise repassée ?

- J'ai une question : à qui est cette voiture, Antoinette ?

- À Emmanuel Bourgaud, le joueur de foot. Mais je vous l'ai déjà dit.

- Qu'est-ce que vous étiez censée en faire ?"

Je subis ses questions. Avec les flics, on a toujours l'impression de commettre une infraction, même quand ils vous demandent de leur passer le sel. Pourtant c'est lui qui roule à tombeau ouvert aux risques d'affoler les radars de vitesse.

"- La ramener à la CLEAN avant ce soir, pourquoi ?"

L'inspecteur zélé arrête le véhicule à une encablure de la CLEAN. Il sort de la voiture, la contourne et ouvre le coffre.

"Cet après-midi, j'ai crevé"

En effet, le pneu usé trône au milieu du coffre.

"Regardez ce que j'ai trouvé dans le compartiment du pneu de secours."

L'inspecteur me montre un sac de sport noir et gris rangé sous le plancher du coffre.

"Drôle de rangement pour un sac de sport. Ah, ces joueurs de foot ! Vous avez regardé ce qu'il y a à l'intérieur ?"

Il me toise et répond :

"Il y a un cadenas avec un code."

Je réfléchis et ajoute :

"Je vais le remettre à M. Anselme avec la voiture. Après tout, ça lui est destiné."

Verrene me retient par le bras, l'air plus suspicieux que jamais.

"Vous ignorez ce qu'il y a à l'intérieur Antoinette, vraiment ?

- Aucune idée, je réponds sincère."

Il me tend le porte-clefs, cassé.

"Mais que s'est-il passé ?

- C'est vous tout à l'heure, en me le lançant du deuxième étage. Il n'a pas résisté au choc."

Je regarde les lettres indépendantes les unes des autres maintenant. Les pièces de scrabble s'entrechoquent au creux de ma main. Lui doit le savoir pour insister autant. Je m'éloigne et tourne au prochain carrefour, à la jonction entre la rue des Lilas et l'avenue Clémenceau. Puis, je reviens en arrière. Verrene parle avec son portable. Impossible d'entendre la conversation animée : l'inspecteur tente de contenir son agacement. Avant d'amener le sac à M. Anselme, je me glisse dans une porte-cochère et déchiffre le code du cadenas. Une première solution me vient à l'esprit : les lettres du porte-clefs, mais c'est une combinaison de 5 chiffres qu'il faut placer sur le mécanisme. Une combinaison alphanumérique ? Mais laquelle ? Ça y est, j'ai trouvé ! J'ouvre le sac et je suis déconcertée par son contenu.

Je me dirige vers les locaux de l'agence comme un condamné à l'échafaud.

Sur la façade, le panneau de la CLEAN avec le nom sans numéro de téléphone ni autre renseignement, juste agence de multiservices.

Je monte les trois étages et passe devant le bureau de Corinne, vide. En ce vendredi soir, les lieux semblent déserts, RTT obligent. Dans la pénombre, j'approche de celui de M. Anselme. Il m'attend, occupé à remplir des documents administratifs. Il ne relève même pas la tête quand je toussote pour l'avertir de ma présence.

"Ah, Antoinette ! Enfin ! Tout va bien ? Vous avez fait bon voyage ?"

Je me souviens du jour où je suis arrivée à CLEAN, le jour de mon embauche. Les conditions paraissaient similaires. Difficile d'admettre que le petit homme obséquieux assis en face de moi se soit rendu coupable de malversations. Enfin, on se trompe souvent sur le vrai visage des gens. Et lorsque je dépose le sac de sport sur la table sans rien dire, M. Anselme desserre son nœud de cravate.

"Vous l'avez ouvert Antoinette ?"

Mon silence confirme ce qu'il sait déjà. Il glisse la fermeture éclair, écarte les pans du sac de sport et me regarde droit dans les yeux.

"L'appât a fonctionné.

- Quoi ?

- Des explications s'imposent. Mais ça nécessite un remontant."

Il sort deux verres d'un meuble à roulette à côté de son bureau et une bouteille de vieux rhum ambré. L'odeur de vanille madérisée me chatouille les narines.

"Il faut que je vous explique tout depuis le début. Vous vous souvenez le jour où vous nous avez rejoint Antoinette, le jour où vous avez rejoint la CLEAN. ?"

Bien sûr que je m'en souviens... Et je me souviens aussi très bien pourquoi. À l'époque je résidais en Suisse. Mais ça, c'est une longue histoire. Que je vous dévoilerai bientôt dans "les 1001 vies d'Antoinette."


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