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La jeune maman

Publié le 15 septembre 2017 par Christinedb

La jeune maman28 janvier 1904, avenue Théophile Gautier à Paris (XVIe), après une matinée pluvieuse, le soleil réchauffe un peu la température. Marie hésite puis décide de sortir promener Madeleine qui babille dans son berceau. Elle la couvre bien, l’installe dans le beau landau et met sa cape et son chapeau. Elle sort du pavillon situé dans la cour de l’immeuble que le père de sa fille, architecte, vient de finir de construire.

C’est dans sa rue que je la croise de façon hautement improbable, comme si j’avais été transportée plus de 100 ans en arrière.

C’est une jeune femme ravissante qui semble heureuse, je suis évidement surprise de cette rencontre et très vite me vient une question à lui poser. Je me permets de l’aborder en la complimentant sur ce beau bébé souriant, puis en me présentant. Elle a du mal à me croire mais a

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envie de parler. Je l’accompagne dans sa promenade vers les jardins du Trocadéro.

-« Je suis tellement heureuse » me dit-elle « Charles a finalement décidé de m’épouser sans tenir compte des réticences de sa famille »

Je ne suis qu’à moitié étonnée, sachant que Marie est fille d’un menuisier de la Somme et que Charles est fils de l’architecte de Napoléon III.

-« Comment avez-vous connu Charles? » cette question me brûle les lèvres car je connais la version donnée par ma grand-mère, mais j’ai toujours eu du mal à la croire. Selon elle, son père avait rencontré sa mère alors qu’elle était demoiselle de compagnie

-« J’ai deux histoires à raconter » me dit-elle « la véritable histoire et celle pour la famille de Charles »

– » Je connais la seconde » dis-je en souriant. Je la sens en confiance et la laisse parler.

– » Je suis née à Ault dans la Somme en 1875, j’étais le troisième enfant de mon père menuisier et de ma mère ménagère. Ma sœur Marie Rose avait 9 ans de plus que moi, mais elle nous a quittés lorsque j’avais 10 ans et je n’ai pas connu mon frère décédé à 1 an. »  Évidement tout cela est bien loin de l’enfance de Charles qui a néanmoins vécu également des drames.

Marie continue:

– » Mon père est mort sur la plage, peu après mes 13 ans et nous nous sommes retrouvées toutes les deux, ma mère et moi,  bien seules. Maman a dû travailler comme serveuse dans un café. Et dès que j’ai pu, j’ai cherché du travail à mon tour, d’abord à Ault puis dans la capitale.  » Elle ne m’en dit pas plus sur ses métiers, mais en arrive à sa rencontre avec Charles.

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– » Lorsque j’étais enfant, un peintre avait fait mon portrait sur la plage  »

-« Oui , je connais bien ce tableau, il est sur le mur de mon salon! Enfant on me disait que je lui ressemblais beaucoup! » Lui-dis-je.

-« Je suis allée  voir ce peintre lorsque je suis arrivée à Paris et me trouvant jolie il m’a proposé de poser pour lui et ses amis…, c’est ainsi que je suis devenue modèle pour des artistes. » Elle se tait un instant, comme gênée d’avoir révélé son secret.

– » C’est ainsi que j’ai rencontré Charles, il y a un peu plus de deux ans, il venait de finir ses études d’architecture et avait beaucoup d’amis peintres, l’un d’eux, Charles Roslin sera d’ailleurs notre témoin le 23 mars à notre mariage. » Elle sourit à ce futur proche.

-« Je plaisais beaucoup à Charles. C’est lorsque j’ai découvert que j’étais enceinte que j’ai eu peur, qu’allais-je devenir? Mais il m’a tout de suite promis qu’il reconnaitrais l’enfant, c’est lui qui est allé déclarer la naissance de Madeleine au mois de novembre dernier. Il a dû beaucoup batailler avec son frère Gabriel, médecin et « bien » marié pour me faire accepter. L’avis de son frère aîné compte beaucoup, car il est sa seule famille. Je vis chez Charles depuis ma grossesse et je fais tout pour être irréprochable aux yeux de ma future belle-famille qui a enfin accepté que nous nous épousions. » Je sens néanmoins une inquiétude dans sa voix comme une prémonition du mal qu’elle aura à faire sa place entre une famille un peu hostile et un mari qui sera assez volage. Mais je ne lui raconte rien de ce que je sais de son avenir, je lui dis juste que Madeleine sera pour moi une grand-mère étonnante.

Je la quitte devant le Trocadéro en la laissant dans ses pensées partagées entre joie et anxiété.

Cet article a été rédigé dans le cadre du #RDVAncestral, un projet d’écriture, ouvert à tous, qui mêle littérature et généalogie. En savoir plus.

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Marie LECLERC N° Sosa : Voir la fiche
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