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Le Diable dans la Légende Arthurienne, XIIe et XIIIe s. -2/2-

Publié le 04 novembre 2017 par Perceval

Le roman de Perceval laissé inachevé par Chrétien de Troyes a fait l'objet, entre la fin du XIIe et le premier quart du XIIIе siècle, de quatre continuations. La Continuation de Gerbert de Montreuil est la quatrième après la Continuation de Manessier.

Le Diable dans la Légende Arthurienne, XIIe et XIIIe s. -2/2-Delacroix

L’œuvre d’origine picarde, est datée du premier tiers du XIIIe siècle. Elle se situe au moment ou Perceval arrivé au château du Roi Pêcheur a réussi à ressouder les morceaux de l'épée brisée en laissant cependant apparaître un petit défaut à la soudure. Alors que dans le récit de Manessier le Roi Pêcheur livre à ce moment à Perceval le secret du Graal, pour Gerbert de Montreuil, Perceval n'est pas encore digne d'entendre le secret et devra se lancer dans de nouvelles aventures avant de l'apprendre de la bouche du Roi Pêcheur. Entre autres aventures « felenesses et dures » : un mariage avec Blanchefleur, de chaleureuses retrouvailles avec Tristan, Gauvain, le vieux Roi Ermite qui veille sur le tombeau de sa mère et même avec Gornumant de Grohaut, son maître ès armes.

Le Diable dans la Légende Arthurienne, XIIe et XIIIe s. -2/2-

L'aventure du Chevalier au Dragon, assortie d'un sermon, porte un sens. L'auteur s'adresse aux chevaliers pour les décider à renoncer à leur vie de péché, car il n'est pas de faute irrémissible. L'épisode, tel un livre d'images, montre le diable redoutable, en apparence invincible, mais bientôt vaincu par le Chevalier du Christ. Il prouve que des plus mauvais chemins, il est possible de revenir.

Le Chevalier au Dragon assiège la Demoiselle de Montesclaire .. Ce méchant chevalier s'est donné au Diable, en échange de quoi il a reçu un écu à tête de dragon qui jette des flammes et brûle ceux qui osent l'affronter. Perceval n'hésite pas à tenter l'aventure. Son bouclier le protège du feu mortel et met le démon en fuite ; mais, sur l'invitation de son adversaire, il renonce bientôt à sa protection surnaturelle. Il finit quand même par triompher, de toutes les façons, puisqu'il obtient que le vaincu se confesse et meure en chrétien.

Le Diable dans la Légende Arthurienne, XIIe et XIIIe s. -2/2-
Lamia - John William Waterhouse

Dans les dernières continuations de Perceval, L'Estoire del Saint Graal, le diable endosse le corps de « la plus belle jamais vue », on nous parle de sa grâce, de son maintien, de son palefroi noir ( un signe ..) ; elle accouche de deux filles qui ne présentent aucun signe disgracieux... mais, elle connaît le passé, et manifestement si elle se rend à l'église pour y entendre la messe, elle en sort systématiquement avant l’élévation ( ce qui fait scandale …) ( le livre de Baudoyn, conte de Frandre) … La succube ne peut être démasquée que par un ermite, qui se signe et l'exorcise … Elle disparaît, et ses filles affirmeront ensuite leur caractère maléfique …

Dans la '' Queste del saint Graal'' ( récit chrétien qui appartient au cycle du Lancelot-Graal (1230) ) le diable est désigné par '' enemi''. La notion de diable est abstraite.

« Le diable tente Perceval sous la forme d'une femme. Ayant échoué une première fois il recourt au procédé de l'intimidation et oppose ses conseils à ceux de l'ermite. Le récit que la jeune fille fait de ses prétendus malheurs pour attendrir le jeune homme est, en fait, l'écho de ceux qui sont arrivés à Lucifer et aux anges révoltés. Le dénouement de l'épisode est soigneusement préparé. La damoisele fait apprêter un magnifique lit : tout, dans la description, vise à insister sur la surprise dont use le diable pour faire de Perceval sa victime. C'est la vue de l'épée et le signe de croix qui sauvent Perceval. Le fantastique accompagne la défaite du diable : « …et maintenant vit le paveillon verser, et une fumee et une nublece fut entor lui, si grant que il ne pooit veoir goute ; et il senti si grant puor de totes parz qu'il li fu avis que il fust en enfer. »

Le Diable dans la Légende Arthurienne, XIIe et XIIIe s. -2/2-
Arthur, Lancelot et Guenièvre ...

Ce qui va perdre Lancelot, ce n'est pas Satan, mais Guenièvre. La christianisme va faire de ''l'amour courtois'' la tentation suprême, que l'on n'ose pas ouvertement, sauf une fois, présenter comme un piège du malin... Les chevaliers vont périr parce qu'ils faillissent à leur vocation spirituelle... Ce qui perd le royaume arthurien, c'est l'imprudence des amants, la rancœur du roi, la guerre qui oppose à Lancelot tout le lignage de Gauvain... Point de sortilège, mais plutôt la notion antique de Destin. ( La Roue de Fortune …). Le XIIIe siècle lettré, va tenter de ne pas croire au Démon, mais au Destin... La Merveille appartient aux créatures de la mythologie qui habite encore les campagnes... Et le Diable, lui, va prendre de l'importance dans les exempla, les vies de saints, les miracles de la Vierge.

Au début du XIVe siècle, le Diable devient une figure ressentie comme une menace pour les chrétiens … '' L'Autre Monde '' est devenu suspect...

Le Diable dans la Légende Arthurienne, XIIe et XIIIe s. -2/2-

Les fées se dépouillent de leur lumière : et Morgane ( ou Morgue) deviendra lubrique, jalouse et méchante, et Viviane perfide …

L'oiseau ''faé '' d'Yonec ( un des lais de Marie de France, XIIe s) - lorsqu'il se transforme en beau chevalier - provoque chez la mal mariée un mouvement de doute et de recul, l'angoisse de la dame est vite dissipée, quand elle voit son futur amant recevoir le ''corpus Dei''. , la dame n'accepte l'amour du chevalier qu'à condition qu'il croie en Dieu : c'est pourquoi il récite son Credo et communie ensuite, après avoir revêtu l'apparence de sa future amie (qui se cache) pour que nul ne soupçonne sa venue.

Dans le lai de Désiré, Graelent et Mélion ; Désiré se repent d'avoir soupçonné son amie la fée d'être un être diabolique lorsqu'elle communie à ses côtés pour lui prouver son innocence. L'autre monde ne redevient maléfique, à l'occasion, que plus tard, au XIIIe siècle.

Sources: Le diable au Moyen Âge : Doctrine, problèmes moraux, représentations [en ligne]. Aix-en-Provence : Presses universitaires de Provence, 1979 (généré le 29 septembre 2017). Disponible sur Internet


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