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La cité des oiseaux

Publié le 07 juillet 2008 par Frédéric Romano
- Ma Mère : Mais enfin, tu n’as qu’à écrire des lettres !
- Moi : Des lettres !? Mais à qui ?
- Ma Mère : Je ne sais pas… à tes amis !
- Moi : Mais quels amis !!!?

Mon Cher Ami,

Voici un an que je suis parti et que je me suis installé ici, dans cette ville que j’appelle familièrement la cité des oiseaux. Je ne t’ai pas donné de nouvelles depuis mon départ. Ce fut sans doute délibéré. Je n’étais pas fâché et, j’en suis certain, tu ne l’étais pas non plus. Nous nous sommes éloigné pour un mieux. Aujourd’hui je le comprends…

Je suis maintenant bien installé dans ma “nouvelle vie”. Cette ville est tellement particulière. Je voudrais tant que tu puisses la voir toi aussi. Une unique ligne de train y amène les nombreux voyageurs qui, comme moi, ont choisi un jour de partir. Le trajet est long et mouvementé. Ce sont des kilomètres de plaines à traverser, des étendues sauvages à perte de vue et, ça et là, un arbre aux formes surréalistes, parfois cauchemardesques. Pendant mon voyage, la nature s’est souvent déchaînée sans retenue sur ces paysages. La pluie, les orages et le soleil aride m’ont à plusieurs reprises terrifié. Les autres voyageurs n’étaient pas plus rassurés mais nous avons tenu le coup, tous ensemble, en nous entraidant. Après la plaine, ce fut la forêt et ses paysages magiques et inquiétant, sombres et profonds. Pendant deux jours nous ne pouvions distinguer le jour de la nuit. Nous nous sentions monter en altitude mais personne ne pouvait nous dire si la destination était proche. En sortant des bois, nous longeâmes les flancs d’une montagne puis derrière celle-ci traversâmes d’épaisses couches de nuages pour enfin apercevoir notre destination. De loin, la ville ressemblait à un énorme dépotoir au milieu duquel on aurait érigé un gigantesque incinérateur, monstrueux et terrifiant. Un voyageur m’expliqua que c’était le siège de la société d’électricité, seule institution où je pouvais espérer trouver un emploi une fois descendu du train. C’était un bon conseil. Sur la terre ferme, je me mis en quête d’un endroit où loger. Ce fut rapide. À quelques mètres de la gare, des centaines de petites chambres semblaient avoir été mises en location pour les nouveaux arrivants du train.

Depuis ce jour je suis employé au service des archives de la société d’électricité. C’est un beau boulot relativement bien payé. Je ne suis pas venu ici pour trouver mon éden professionnel. Tu le sais, je suis parti pour me retrouver. J’ai rencontré ici des gens que tu aurais pu connaître. Ils sont pareils aux personnes que l’on trouve chez toi, aux hommes et aux femmes que nous avons côtoyés ensemble à une époque. Te rappelles-tu ? C’était il y a plus d’un an. À cette époque on nous confondait souvent tous les deux et nous aimions nous prendre à ce jeu. Tu te faisais appeler Romain et moi j’endossais le rôle de Frédéric, râleur et pessimiste comme il te plaît à te définir… J’aimais cette époque mais je comprends que tu ne veuilles plus participer à ces gamineries. Nous avons grandi tous les deux et nous devons à présent vivre notre vie chacun séparément. Là où je suis, je sais que personne ne peut venir me voir et j’en suis très heureux. En réalité toi seul te souviens dorénavant de mon existence et toi seul peut donc me faire sombrer dans l’oubli. Quel pouvoir tu as. T’en rends-tu compte ? Je devrais en avoir peur mais je sais que tu ne m’effaceras jamais de ta mémoire. Quelque part tu apprécies te remémorer Romain comme tu aimes te souvenir d’un agréable parfum.

J’espère que ta vie est belle et qu’elle prend la tournure que tu souhaitais toi-même lui donner. Très sincèrement, c’est tout le bonheur que je peux te souhaiter….

Amicalement,

Romain
Le 3 août 2006


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