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L’accent, un problème grave (c’est pourri, je sais)

Publié le 20 octobre 2018 par Legraoully @LeGraoullyOff

Quand un gamin devient la tête de turc de ses camarades d’école, voire de ses professeurs, sous prétexte qu’il a un défaut d’élocution ou un petit accent arabe, qui s’en soucie ? Personne ou presque. Quand un pauvre type se fait refouler par les recruteurs et reste voué au chômage et à la précarité sous prétexte que son accent de « pas-de-chez-nous » risquerait d’indisposer le client, qui s’en soucie ? Là encore, personne ou presque. Quand un jeune gars plein d’idées et d’espoir « monte à la capitale » dans l’espoir d’y faire fructifier ses talents mais ne rencontre que le mépris des Parisiens qui se moquent de son accent de « plouc », qui s’en soucie ? Toujours personne ou presque. Et quand une femme sérieuse, honnête et courageuse qui ose briguer la présidence de la République (toute ressemblance avec une ancienne juge reconvertie dans l’écologie politique ne serait nullement fortuite) se fait chambrer par les éditorialistes et les humoristes couchés à cause de son accent scandinave, qui s’en soucie ? Ne cherchez pas : personne ou presque.

Tout ceci pour dire, sans vouloir prendre à tout prix la défense de Jean-Luc Mélenchon, que je trouve quelque peu hypocrites les belles âmes de chez nous qui s’offusquent qu’il se soit moqué d’une journaliste à l’accent du Midi : cette réplique avait beau être lamentable, elle ne l’était guère plus que toutes les brimades qu’endurent au quotidien, dans notre beau pays de la tolérance et de l’égalité, tous ceux qui n’ont pas la langue plate et monochrome comme un tableau de Klein. Loin d’ôter à Méluche le droit de se présenter comme le « candidat du peuple », cette blague montre qu’il est parfaitement représentatif du peuple de France !

Vous trouvez que j’exagère ? C’est possible… Mais n’empêche. N’empêche : quand Marsault, Dieudonné, Zemmour, Finkielkraut ou un autre néo-réac imbécile (un pléonasme, excusez-moi) provoque l’indignation après avoir sorti une énième ignominie sur les femmes, les Noirs, les Juifs, les Arabes, les homosexuels ou toute autre frange de la population qui ne ressemble pas à Clovis, le néo-réac en question peut compter sur toute une cohorte d’idiots utiles, prétendument de gauche pour certains, qui viennent prendre sa défense au nom de la liberté d’expression : ils nous sortent « on ne peut plus rien dire », ils collent des étiquettes « politiquement correct » à tour de bras, ils traitent de « bobos bien-pensants » les détracteurs de leurs idoles merdeuses.

Or là, en revanche, ils sont plutôt silencieux ! Ou alors ils joignent leur voix à ceux qui crient haro sur Méluche ! En clair, pour eux, les propos discriminants, quand c’est un facho de la pire espèce qui les profère, c’est bien, mais quand c’est le leader de La France Insoumise qui s’y laisse aller, c’est mal. On peut difficilement être plus clair concernant le choix de son camp !

En tout cas, j’espère que ce dérapage de Mélenchon ne va pas servir de prétexte aux défenseurs des cultures régionales pour se tourner vers les néo-fascistes : qu’ils n’oublient pas que quand l’Assemblée Nationale a voté la ratification de la Charte européenne des langues régionales, les députés d’extrême-droite se sont unanimement prononcés contre ! Les ennemis de nos ennemis ne sont pas forcément nos amis…

L’accent, un problème grave (c’est pourri, je sais)


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