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Avec Notre-Dame, reconstruire la France

Publié le 17 juin 2019 par Observatoiredumensonge

Il n'y a pas que la cathédrale de Paris qu'il faut rebâtir. La France, déprimée par sa culpabilisation et la valorisation de l'Autre, a aussi besoin d'être reconstruite.

Avec Notre-Dame, reconstruire la France

"Avec Notre-Dame, reconstruire la France"

Par Ivan Rioufol

CHRONIQUE - Il n'y a pas que la cathédrale de Paris qu'il faut rebâtir. La France, déprimée par sa culpabilisation et la valorisation de l'Autre, a aussi besoin d'être reconstruite.
Marie saura-t-elle rassembler les Français divisés? Ce serait là un miracle pour l'Église éreintée et pour la nation déchristianisée. Néanmoins, force est de constater la sidération collective née de l'incendie de Notre-Dame de Paris, dédiée à la Vierge. Dès les premières flammes, la vie politique s'est effacée derrière la puissance intacte d'une mémoire millénaire. Le feu a jailli, lundi à 18 h 50, d'une partie de la charpente en chêne posée il y a huit cent cinquante ans. L'enfer a ravagé la toiture de la cathédrale, symbole de la chrétienté en Europe depuis le XIIe siècle. Emmanuel Macron, qui devait distiller à 20 heures ses premières mesures après le grand débat, a judicieusement choisi de différer ses annonces. Les partis ont également suspendu leurs joutes en perspective des élections européennes. La soudaine vulnérabilité de Notre-Dame, gravement défigurée en une poignée d'heures, est venue rappeler, comme un châtiment, la fragilité d'une nation quand elle devient oublieuse de son passé et de sa culture. Dans la soirée, le président a appelé, "tous ensemble", à rebâtir l'édifice. Pour une fois, Macron a su être enthousiasmant.
L'occasion est donnée aux Français, éduqués dans l'illusion créative de la table rase et de l'homme nouveau, de retrouver le goût de la conservation, de la transmission, du respect des racines
Il faut parfois des tragédies pour sortir les peuples décadents de leur frivolité amnésique. Le temps dira si la douleur causée par la blessure d'un chef-d'œuvre, sorti des mains de générations d'anonymes inspirés par la quête du beau et du bien, saura se transformer en une renaissance. C'est pour avoir orgueilleusement négligé la mémoire et la lente expérience, au profit de la jouissance immédiate, que la modernité a renoncé à s'identifier à un idéal partagé. Le cheap, le toc, le bagou accompagnent son sillage. Rien n'est donc plus disruptif - ce mot macronien - que de tenter d'être à nouveau à la hauteur des humbles bâtisseurs du Moyen Âge. Lundi, une souscription nationale a été lancée pour faire renaître Notre-Dame de ses cendres. Beaucoup des plus grandes fortunes de France ont rapidement offert près d'un milliard d'euros. De nombreuses autres familles les suivront, sachant où ira leur argent.
L'occasion est donnée aux Français, éduqués dans l'illusion créative de la table rase et de l'homme nouveau, de retrouver le goût de la conservation, de la transmission, du respect des racines. Les déconstructeurs de l'identité nationale, vue comme une lubie réactionnaire, apparaissent déjà pour ce qu'ils sont: les maltraitants d'une nation attachée à ses souvenirs chéris. Il suffisait de voir la foule prier et pleurer devant son église en feu pour s'en convaincre. Ce sont les "progressistes", ennemis de la nostalgie, du respect des ancêtres et des vieilles pierres, qui ont affaibli la France à force de lui seriner qu'elle était dépassée, laide, odieuse. Ces jours-ci, ces fossoyeurs ont pris l'habit gris muraille, au spectacle de Notre-Dame martyrisée. Mais n'était-ce pas ce que recherchaient ceux qui exigeaient, au nom d'une laïcité intégriste, la disparition de la "fille aînée de l'Église"? Certains de ceux-là en viennent à se lamenter sur le mauvais sort qui s'abat sur le pays fracturé. Puisse ce triste spectacle, qui symbolise la civilisation malade, les réconcilier avec la nation honnie.
C'est bien l'effondrement physique d'une civilisation ringardisée qui bouleverse le monde
La France n'a pas besoin d'être "transformée", comme le prêche le chef de l'État depuis deux ans. En février 2017, il assurait de surcroît, tout à sa séduction des nouvelles minorités: "Il n'y a pas de culture française." Or c'est bien l'effondrement physique d'une civilisation ringardisée qui bouleverse le monde. La France, déprimée par sa culpabilisation et la valorisation de l'Autre, a besoin d'être reconstruite. Jean-Pierre Chevènement à bien résumé l'enjeu, mardi: "Ce n'est pas seulement Notre-Dame de Paris qu'il faut rebâtir, c'est le patriotisme français, c'est l'histoire de France, notre récit national, notre République."
Tous les Français sont-ils prêts à se retrouver autour de Notre-Dame, c'est-à-dire autour de la protection affectueuse d'une Église catholique atteinte moralement et spirituellement? Les autorités juives et musulmanes ont fait connaître très vite leur solidarité avec les catholiques. Mais, sur Twitter, de nombreux islamistes se sont félicités de l'incendie, dont la cause reste à ce jour inexpliquée. Les Amis de la Diversité ont feint, une fois de plus, de ne rien remarquer de cette sordide jubilation.
Rebâtir la démocratie
Au-delà de Notre-Dame, ce n'est pas seulement la nation qui est à reconstruire avec le soutien de son peuple. C'est la démocratie qui est à rebâtir. Macron, candidat à la présidentielle, déplorait en octobre 2016, "une démocratie qui manque d'adhésion, qui ne permet plus d'inclure les gens, de bien les représenter, de leur donner leur juste place (...)". Or, depuis, le président a perpétué un pouvoir personnel et solitaire, y compris dans la conduite du grand débat suscité par la révolte des "gilets jaunes". Si le chef de l'État a renoncé à exposer ses réponses, lundi soir, leur contenu a été dévoilé. Le résultat est loin des mesures "rock'n'roll" et "waouh" promises par l'Élysée. La crise de la démocratie, ouverte par les Français oubliés, ne sera pas résolue avec la faible dose de proportionnelle et l'assouplissement du référendum d'initiative partagée que propose Macron. On chercherait en vain un sens à cette nouvelle politique.
Il est vrai que les beaux esprits persistent à rivaliser de mots assassins sur les "gilets jaunes". Ils ont été, dès le départ, qualifiés de ploucs, beaufs, imbéciles, alcooliques. Ils ont droit aussi à: fascistes, antisémites, homophobes, totalitaires, factieux. Le président a donné l'exemple. L'historien qui relira ces insanités retrouvera l'expression de l'insensé mépris qu'éprouvent les "élites" pour le peuple en colère. Il y a des abrutis, des casseurs et des pilleurs en puissance chez les plus radicaux. Cependant, les protestataires que votre serviteur rencontre, à Paris, chaque samedi ou presque depuis le 17 novembre sont moins ridicules que la somme des arrogants salonnards. Puissent ces braves se garder des tentatives de récupération de la gauche archaïque et violente, qui insulte les "riches" donataires de Notre-Dame en réclamant l'aumône.
Autre calvaire
Macron veut reconstruire la cathédrale en cinq ans. Il la promet "plus belle encore". Il réclame "un geste architectural contemporain" pour remplacer sa flèche brisée... Un autre calvaire s'annonce pour Notre-Dame, plongée dans une modernité impatiente, suffisante et matérialiste.

Avec Notre-Dame, reconstruire la FranceIvan Rioufol

éditorialiste au Figaro

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Ivan Rioufol pour Le Figaro

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