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Le supplice du matelas à ressorts

Publié le 16 juillet 2008 par Cochondingue

Je ne peux pas y échapper. Les vacances à Limoges sont le passage obligé pour entretenir de bonnes relations avec ma belle-famille. Notez bien que je n’ai rien contre ma belle-famille, mais j’en ai contre Limoges, le Limousin en général et ses étés exécrables en particulier.
Puis bon, c’est la campagne, et qui dit campagne dit araignées, vers de terre et anacondas.
Pas franchement un endroit idéal pour se reposer.
Entre deux averses, on essaye de faire sécher le linge. Comme on n’y arrive pas, on sent le chien mouillé. La pluie a le seul avantage de nous éviter la corvée de la douche dans le seau usé, qui a appartenu à Napoléon avant sa campagne d’Italie (du moins c’est ce que nous raconte l’ancêtre du village, le soir au coin de la bougie, quand on essaye de se réchauffer, les mains autour de la petite flamme).
Le problème de ne pas avoir d’électricité, c’est que la nuit on se pète la gueule et forcément après on a des ongles incarnés. Manquerait plus qu’on aille chasser nous-mêmes le gibier et j’aurais l’impression de vivre au Moyen-âge.
Mais je supporte tout cela. Courageusement. Sans maugréer. Oui, je suis forte. Et s’il n’y avait pas ce putain de matelas à ressorts qui me rentre dans le dos, je pourrais dire que je suis l’abnégation même. Mais trop, c’est trop. La coupe est pleine.
- Ca va Cochon ? Bien dormi ?
- Non, très mal.
- Des cauchemars ?
- Non, c’est le matelas.
- Tu recommences à faire ta princesse, me sort beau-papa avec un grand sourire.

Moi, je fais ma princesse ? Moi, qui vais chercher l’eau au puit avec mes sabots crottés, qui trait les vaches et m’occupe de cuire les radis pour la soupe. Moi qui ai risqué ma vie dans un combat féroce contre une limace trop orange pour être honnête. Moi une princesse ?
Je suis restée trop polie jusqu’à maintenant, mais je crois que ma belle-famille n’a pas intégré un truc pourtant élémentaire : je suis une citadine, une parigot ! Sans connexion internet, je me meurs. Sans Delarue à la télé, je ne sais plus de quoi parler en société.

- Non, je ne fais pas ma princesse, ce matelas est pourri et j’aurais dormi par terre s’il n’y avait pas plein d’araignées et de scarabées.
- Qu’est-ce que tu racontes, ce matelas est quasiment neuf !
- Par quasiment neuf, tu sous-entends qu’il a une centaine d’années et que de génération en génération il a fini par se retrouver dans une décharge ou tu l’as bien sûr récupéré ? Si tu avais essayé une seule petite fois ce matelas, tu aurais compris que comme instrument de torture, on ne fait pas mieux. Les ressorts pénètrent dans chaque centimètre de la peau et percent petit à petit l’épiderme. Je n’ai pas envie de finir ma vie embrochée sur un ressort. Je mérite mieux, non ?
- Allez, arrête ton cirque et va labourer les champs si tu veux manger ce soir !


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