Magazine Journal intime

L’environnementalité

Publié le 16 octobre 2019 par Hugo Bourque

Récemment, dans un restaurant, j’ai commandé un drink et l’on me l’a servi avec une paille en genre de carton qui se décompose dans ta bouche à mesure que tu bois. Pour la planète, c’est génial ; pour l’expérience client, on repassera. Mais ça m’a fait réaliser qu’on n’a pas toujours été préoccupé ni même concerné par l’environnement. Aujourd’hui, beaucoup de nos faits et gestes sont directement reliés la survie de notre terre adorée : on recycle, on composte, on trie, on sauvegarde, on protège, on électrifie, on se signe des pactes, on se manifeste, on se sonne l’alarme… Mais quand j’étais jeune, on était très loin de se douter que la planète pourrait un jour rendre son dernier souffle. 

Je me souviens entre autres que lorsque notre p’tite drive du dimanche après-midi s’étirait jusqu’à la Grande-Entrée, j’étais toujours surpris de voir des boîtes de Dixie Lee abandonnées sur le bord du chemin dans le bout de la Grosse-Île. Évidemment, aujourd’hui, je peux déduire que ceux qui faisaient ça ne voulaient pas attendre d’être arrivés chez eux pour manger une poitrine frette et des frites molles dans une boîte de carton détrempées par la steam. Mais ça aurait été quoi de garder les déchets à bord jusqu’à une poubelle ?

À l’époque, il n’était pas rare de surprendre quelqu’un qui arrêtait son gros Oldsmobile sur le parking du centre d’achats, ouvrait sa porte et vidait tout le contenu de son cendrier de char par terre. Comme ça. Sans gêne et sans scrupule. Des botchs, de la cendre, de la gomme roulée en petite boule… tout ça au grand vent. Et ça, c’est quand le mégot se rendait dans le cendrier parce que généralement, il se faisait pichenotter dehors pendant la runThat’s it, that’s all. Je veux bien croire qu’on n’était pas encore conscient de toute la fragilité de notre environnement, mais ça ne prend pas une longue formation d’Attention FragÎle pour voir que quelque chose n’allait pas avec ce comportement-là. Sans compter tous ceux qui conduisaient avec la cigarette pincée entre les doigts, le bras dehors pour que le vent s’occupe de toper la cigarette au fur et à mesure qu’elle brûlait. Ce n’est sûrement pas ça qui a détruit la couche d’ozone, mais rappelez-vous qu’à l’époque tout le monde fumait. Tout le monde. Ça fait pas mal de cendre dispersée un peu partout sur la 199. 

Ce qu’on voyait souvent dans le canal en face de chez nous, c’étaient des bouteilles de bière vides. Ça aussi, on n’avait pas peur, dans le temps, de garrocher ça dans l’univers. On se promenait avec notre p’tite frette dans la fourche, et quand elle était vide, on la lançait à travers la vitre ouverte en la faisant tournoyer comme un Frisbee jusque sur le terrain de quelqu’un. Un peu plus loin, on s’en décapsulait une autre avec la boucle de notre ceinture détachée, on pitchait le bouchon par la fenêtre également, et l’on recommençait tout ça sur d’autres terrains. Aujourd’hui, même un cœur de pomme, c’est mal vu de jeter ça dehors. 

L’huile qu’on épandait sur les chemins de gravaille pour les empêcher de faire de la poussière ne serait sûrement pas approuvée par le ministère de l’Environnement d’aujourd’hui non plus. Pourtant, à l’époque, le truck passait en mettre sur le chemin des chalets et deux secondes plus tard, j’étais accroupi dans une bouillée de p’tites fraises des champs en bordure de la route fraîchement goudronnée. Je n’ai jamais eu de maladie pour ça. Une urine foncée, mais jamais de maladie.  

Aussi, ça a longtemps été un vrai free-for-all sur les plages et les dunes. Quatre roues, trois roues, deux roues, pas de roue. On allait partout, un point c’est tout. C’était à nous et ça n’allait jamais mourir. Mais pourquoi pensez-vous que le pluvier siffleur est en voie d’extinction ? Mets un petit œuf de l’oiseau à côté d’une trimoto et tu vas tout comprendre. Ce n’est évidemment pas juste à cause de ça, mais disons que ça n’aidait pas les pauvres oisillons à avoir une longue vie. Et quand j’étais petit, on n’avait pas de rampe d’accès pour se rendre à la plage sans écrabouiller les foins de dune. On se piquait les pieds en pilant dessus sans même l’ombre d’une inquiétude avec le fait qu’on était en train de détruire quelque chose d’important. 

Heureusement, aujourd’hui on recycle, on composte, on trie, on sauvegarde, on protège, on électrifie, on se signe des pactes, on se manifeste, on se sonne l’alarme. Surtout que lorsqu’on vit sur un diamant comme les Îles, il faut tout faire en notre pouvoir pour le laisser lisse et poli le plus longtemps possible.

J’ai donc continué de siroter mon drink avec ma paille en carton qui se décomposait dans ma bouche à mesure que je buvais en me disant que, même si j’avalais des bouts de pailles, ça n’allait sûrement pas me donner de maladie. Des urines foncées, peut-être, mais pas de maladie.  

On se r’parle !

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