Des alvéoles par millier.
Des boulent noires et jaunes s’élancent de ces orifices et fendent l’air comme des milliers de projectiles.
Leur cible : les fleurs et leurs doux chants mélodieux. Les abeilles sont obnubilées par ces invites sucrées.
Ce sont autant d’archipels colorés qui agitent leurs pétales au gré d’une brise printanière.
Mais, une camera embarquée sur le dos de nos vrombissants insectes nous offrirait une vision féerique. Des reliefs accidentés aux flaques
miroitantes, des vallons de verdure aux énormes troncs nervurés.
Puis, au détour d’un promontoire, le Graal. Une étendue gigantesque de fleurs aromatiques, une réserve immense de pollen.
Les gardiens papillons n’ont qu’à bien se tenir, nous devons construire un monde de miel.
Les pattes chargées des précieuses boulettes. Les ouvrières prennent leur envol. Exténuées par cette lourde tâche, une image les galvanise : leur maison mère.
Enfin arrivées à bon port, elles s’insinuent dans la pénombre grouillante des coursives, palpant de gauche et de droite à l’aide de leurs antennes qui véhiculent tant d’informations.
Le message se transmet ainsi, par tapotements et frottements.
Une nouvelle escadrille se prépare à l’excursion roborative.
Maintenant, ouvrons les yeux. Doucement, doucement. Les rayons titillent vos paupières et y dessinent de jolies arabesques. La lumière éblouissante s’évapore peu à peu pour vous révéler les
courbes d’un monde manichéen de circonvolutions saturées de minuscules points noirs. Ils circulent à des vitesses étourdissantes et s’engouffrent dans des conduits tubulaires qui s’achèvent sur
des aberrations mécaniques. Là, point d’ailes frêles et diaphanes, juste une carlingue d’acier disgracieuse.
Ces étranges oiseaux de fer quittent le sol pour se noyer dans le firmament emportant les ponctuations frénétiques vers des terres gorgées de dollars.
Quel vertige ! Quelle effervescence ! Quel flux ininterrompu !
Bienvenue dans le plus grand aéroport de France.