Magazine Journal intime

Je laisse la neige tomber

Publié le 14 janvier 2024 par Barbu De Ville @barbudeville

À  l’époque dans mon quartier d’enfance, je laissais la neige  tomber.

Un  jour, j’ai perdu mon cœur d’enfant. Je ne sais pas où, je ne l’ai jamais  retrouvé. Probablement qu’il est avec ses bas pas pareil,ses gants et tuques que  je perdais au primaire à une vitesse folle. D’ailleurs, mon fils a la même  maladie que moi. Il est déjà revenu de l’école en plein hiver avec une seule  botte! L’autre court toujours au large, je ne sais où. J’espère qu’elle est  tombée au pied d’un petit morveux qui a perdu une botte lui  aussi.

Chaque  tempête de neige me rappelle mon quartier d’enfance. Chaque tempête me rappelle  l’odeur du froid après trop de temps à l’extérieur, me rappelle que ma mère se  choquait parce que je ne rentrais pas pour dîner et elle devait sortir dehors et  presque crier pour que je vienne souper, l’euphorie d’apprendre que l’école est  fermée, le bonheur de marcher dans la neige qui crispent sous vos semelles de  botte Sorel!

Mon  quartier à l’époque à ce moment précis était enfermé dans une boule de Noël! Et  le grincheux était un vieux soulon qui buvait du vin chaud et pour dire la  vérité notre Nicolas n’était pas vraiment un saint.

C’est  simple, les soirs de semaine ou le weekend, le seul temps que je fusse dans le  logement familial c’était pour l’émission Bagatelle, le Canadien ou pour dormir!  Ce qui fait que j’avais le bout des orteils gelés en permanence de novembre à  mars inclusivement. Je me souviens surtout que j’étais plus souvent heureux que  malheureux surtout le soir, la fin de semaine, pendant les vacances, mais  surtout pendant les journées de tempêtes de neige, congé improvisé. C’est  d’ailleurs à cette époque que j’ai appris le mot improvisation au même moment   je découvrais Robert Gravel.

Les  flocons qui tombent dehors, le spectacle est féérique à travers la fenêtre de ma  chambre. À l’écran de télé à Radio-Québec, c’est La Ligue nationale  d’improvisation. J’ai un chocolat chaud dans les mains et le bonheur est facile,  à porter de main c’est comme s’il était palpable . C’est à ce moment précis une  improvisation simple, jouer en toute innocence.

Parfois,  la vie s’arrête comme si la terre avait arrêté de tourner juste pour nous. Le  bonheur est un moment burlesque qui dure le temps d’un sourire.

Cette  semaine à Montréal, c’était la première tempête de neige avec un beau cocktail  de précipitations ( c’est mon petit côté Colette Provencher). Première neige qui  reste au sol presque à la mi-janvier.

Étonnamment,  je n’ai pas chialé. Zéro, niet, nada! Pourtant j’aurais pu comme avant  m’apitoyer sur mon sors d’adulte responsable. Chialer et chialer jusqu’à perte  d’identité.

Soir  de tempête, soir de spectacle au Centre Bell, la ville ce soir était dans le  creux de la main du rappeur Travis Scott, je laisse la neige tomber, je laisse  la neige tomber sur les édifices du centre-ville. Je la laisse tomber comme dans  mon enfance. Je suis au cœur du centre-ville, il neige à gros flocons, le vent  entre les édifices à perte de vue pourrait pousser le Titanic tellement il est  puissant. Moi je me stationne avec le bonheur d’Amélie Poulin entre les  oreilles  et le sourire niais de Juste Leblanc. Les enfants sont au centre Bell  et vivent une soirée mémorable pendant que moi je laisse tomber la neige avec ma  blonde au restaurant. Personne ou presque dans les rues, nous avons la rue  st-catherine au complet comme place de stationnement. C’est comme si le  centre-ville était dans une boule de Noël.

J’ai  retrouvé mon cœur d’enfant à 50 ans en pleine tempête de neige, mon nom est  barbu de ville.


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