<< Poésie d'un jour
Lydia Padellec autoportrait / source
L’ampoule de la lampe crépite au bruit du
tonnerre. Ses motifs de feuilles rouges
tressaillent, se détachent et se mettent à
tournoyer dans l pièce. En vérité, ce sont des
zygaena filipendulae. Ils s’amusent à papillonner
les nuits d’orage. À se pendre au lustre du salon.
En laissant sur leur passage des fils transparentes
et lumineux. (24)
Klogorenn al lamp tredan a zrast gant trouz an
arneu. Tresadennoù deil ruz a skrij, a zistag hag a
dro er gambr. E gwir, « zigaena filipendulae »*
int… C’hoari a reont da droidellañ en nozvezhioù
arneu. Da vont a-stribilh diouzh lampa ar saloñs.
En ur lezel war o lerc’h neudennoù treuzwelus ha
Skedus.
*Un doare a valafenning anvet « papilhonig noz ». (p. 80)
Des pissenlits dans les cheveux. Une odeur
forte d’humus. La terre du géranium blanc se
soulève sous le poids des ongles. L’engrais salé
n’engraisse pas la plante ni le souvenir. Des
pissenlits dans les cheveux et dans l’assiette en
plastique. Des pissenlits au goût amer. (25)
Chwervizon em blev. C’hwezh kreñv an douar.
didan pouez ma ivinoù e sav douar ar jeraniom
gwenn. An temz sall ne demz naga r plant nag an
eñvor. Chwervizon em blev hag en asied plastek.
Chwervizon blaz c’hwerv dezho. (p.81)
De la chambre émane un parfum d’humus et de
poussière. Une pièce petite comme celle d’une
boîte à musique. La ballerine au corps de
porcelaine ne tourne plus en rond. La flûte
enchantée n’enchante plus.(31)
Diouzh ar gambr e sav urf rond a zouar hag a
boultrenn. Bihan ar pezh, heñvel ouzh ur voest-
muzik. An dañserez he c’horf porselen ne dro mui
klok. « Ar fleüt strobinellus » ne strobinell mui. (87)
Les courants d’air apportent les battements
fragiles du dehors. Une musique : Lady sings the
blues. Elle traverse les pièces de sa robe bleue.
Sensuelle. Ses pieds nus frôlent à peine le dallage.
Derrière son passage, les portes claquent. Ne
reste qu’un parfum discret de gardénia. (50)
Deus an diavez e tigas an avelioù-red
stlakadennoù tanav. Ur sonenn : « Lady sings the
blues ». Treuziñ ara pezhioù an ti gant he sae
c’hlas. Friant. A-boan ma spin he zreid noazh ar
c’harrelladur. Stlakañ’ra an norioù war he lerc’h.
Ne chom nemet urf rond gardenia soutil. (p. 106)
La poignée de la porte est moite. Un rayon s’y
reflète comme un sourire. Un lézard minuscule et
doré se faufile par la serrure. Vers l’extérieur. Le
panneau de bois transpire du parfum des fleurs et
du cri jouissif de la mésange.
J’ouvre la porte. Le bleu m’envahit. Entièrement. (51)
Mouest dorn an nor. Ur bannad heol a sked
warnañ evel ur mousc’hoarzh.
Ur glazard bihan alaouret en em sil dre ar potailh.
War-zu ar porzh. C’heweziñ a ra ar panell gant
frond ar bleuñv ha kri friant ar pennduig.
Digeriñ a ran an nor. Ar glasder a veuz ac’hanon.
Penn-da-benn. (107)
Lydia Padellec, « Rez-de-chaussée»/« marée basse »//« Vers le toit »/« marée haute » in La Maison morcelée, Nouvelle édition augmentée
suivi de An Ti didammet, «Rez-an-douar / Izelvor »/« War-zu an doenn »/« Uhelvor », Traduction en breton par Mai Ewen,
Éditions Sauvages, Collection Phénix 2023, pp. 24, 80, 25, 81, 31, 87, 50, 106, 51, 107.
L Y D I A P A D E L L E C
Source
■ Lydia Padellec
sur Terres de femmes ▼
→ [C’est dans l’intimité du brin d’herbe…] (extraits de Cicatrice de l’Avant-jour)[+ une notice bio-bibliographique]
→ Dans la nuit profonde du jour (extrait de Cicatrice de l’Avant-jour)
→ Entre l’herbe et son ombre (Titre provisoire) [extraits]
→ « Île muette » (extrait de Mélancolie des embruns)
→ (dans l’anthologie Terres de femmes) La mère [extrait d’Entre l’herbe et son ombre (Titre provisoire)]
→ Chambre en Elle, En couverture: Nacer De Nuevo, Remedios Varo,1960, Collection Pour un ciel désert,
Éditions Rafael de Surtis, 2022.
■ Voir aussi ▼
→ Sur la trace du vent, le blog personnel de Lydia Padellec
→ (sur le site de la Maison des écrivains et de la littérature) une notice bio-bibliographique (+ des extraits)
→ le site des éditions Lunatique