Valérie Canat de Chizy | La Langue des Oiseaux

Publié le 26 février 2024 par Angèle Paoli

<<Poésie d'un jour


Aquarelle
 de Valérie Canat de Chizy 

Ce qui   m’apaise,    c’est la nature, la
poésie. Partir dans un endroit très vert,
sortir le chat,   observer  par la fenêtre
humer les plantes. Il est  posté sur une
rambarde en bois.  Seules  ses oreilles
bougent. Ma plus grande peur : ne plus
pouvoir   m’évader.   C’est   cela   qui
fait barrage contre tous les fantômes qui
viennent m’assaillir. J’ai toujours peur de
la chute,   du gouffre    dans   lequel je
pourrais tomber.   Je tomberais dans un
trou et le monde   se retournerait contre
moi.   D’où vient   cette image ? Il  n’y
aurait    plus que   des présences
malveillantes.   Je serais   assise,
recroquevillée dans l’obscurité. Comme
un enfant qui a peur dans le noir…

J’ai conservé ses cendres durant un an,
dans    une petite boîte   en carton
biodégradable, couleur lie-de-vin. Puis,
l’été suivant,   à la pointe du  Milliet,
j’avais  dans   mon sac à dos   l’urne
d’Osiris. Je marchais le long du sentier
côtier, me laissant bercer par le bleu roi
de la mer. À un moment, la pente devint
douce, la voûte des pins déboucha sur
une petite crique. C’était la marée basse.
Contournant la crique,  j’escaladai de
gros rochers,   et arrivai à une grande
cavité, en me penchant, je pus voir la
mer s’y engouffrer avec fracas, faisant
jaillir l’écume. J’ouvris l’urne
délicatement. Je fus surprise. C’étaient
de légères particules  blanches.   Je me
penchai pour déverser le contenu de la
boîte. La poussière d’os vola, se déposa
sur le rocher situé plus bas. La roche fut
recouverte d’une poussière fine. La mer
l’emporterait, la pluie la laverait, le soleil
la couverait   et elle serait bercée  par le
vent, s’envolerait même, se disperserait.

Valérie Canat de Chizy, La langue des Oiseaux,
La main aux poètes, Vignette de couverture Isabelle Clément,
Éditions Henry, La Rumeur libre Éditions, 2023,pp.16,19, 20.

VALÉRIE CANAT DE CHIZY



Source 


■ Valérie Canat de Chizy
sur Terres de femmes ▼
→ 
[Je me tiens à une rampe, pour ne pas tomber] (poèmes extraits de Je murmure au lilas (que j’aime))
→ Je murmure au lilas (que j’aime)[lecture d’Isabelle Lévesque]
→ [L’écriture s’étiole] (extrait de Pieuvre)
→ [La clôture est autour] (poème extrait de Talisman)
Caché dévoilé, Jacques André éditeur, Collection poésie XXI n° 50, 2019
■ Voir aussi ▼
→ (sur le site de Jacques André éditeur) la fiche de l’éditeur sur Caché dévoilé de Valérie Canat de Chizy
→ le blog de Valérie Canat de Chizy