659 – Double sens

Publié le 03 mars 2024 par Stiop

Je vous mets au défi d’écouter une intervention d’un élu, d’un opposant politique ou d’un prétendant au pouvoir sans qu’il ne brandisse la notion de « responsabilité ».

La voix grave, martiale, annonciatrice de la fin des temps, le menton relevé devant le micro d’un journaliste ébaubi, nos élites convoquent en permanence mieux encore : « l’esprit de responsabilité ».

Bullshit.

Ok les gars, on se détend, on fait comme si une caméra n’était pas braquée sur vous et on essaye de se départir de vos séances discount d’Actor’s Studio que des conseillers en communication zélés vous ont vendu à prix d’or.

Faisons un peu de sémantique. La responsabilité peut s’entrevoir selon deux notions majeures dans notre belle langue.

C’est d’une part, en droit, l’obligation de réparer le dommage que l’on a causé par sa faute et d’autre part, à titre personnel : prendre à son compte, assumer, endosser.

Bon, nos politiques choisissent quoi ? Agir et puis se défendre d’avoir mal agi en basculant la faute sur les autres ? Je résume.

Mais vous la percevez comment, leur responsabilité : une faute ou un devoir moral ?

Je suis toujours surpris à quel point le discours des gouvernants et de leurs opposants est infantilisant. Il n’y aurait d’un côté que des responsables, et de l’autre, des êtres immatures, des imbéciles. L’agora politique et la cour de récréation d’une école primaire, quelle différence majeure ?

Au moins une, ceux qui sont tenus pour responsables se retrouvent parfois devant la justice et rendent compte de leurs responsabilités. Ding ding ding, la cloche sonne, le tocsin pour certains, quand d’autres continuent à gesticuler dans les médias. Je suis fatigué.

Vu sous le curseur de la citoyenneté – via le pourcentage décroissant de personnes qui se déplacent dans les bureaux de vote -, je serais tenté de décrire la notion de responsabilité comme un repoussoir, un écœurement, mais à quoi ressemblent nos « responsables » ?

Tous responsables de notre indifférence, du spectacle quotidien de vos querelles de série B, de vos rivalités feintes, de vos éléments de langage dont la « responsabilité » est le point cardinal, tous responsables du mépris que vous avez pour ceux qui vous ont porté au pouvoir.

Le barnum des élections européennes de juin prochain promène son chapiteau depuis quelques semaines dans vos radios, vos télévisions et vos fils d’actualité ; voyez ses clowns, ses maîtres de cérémonie, ses singes savants, ses animaux dressés, ses acrobates, sa ménagerie, ses illusionnistes, ses contorsionnistes, ses équilibristes…

Phineas Taylor Barnum, né au 19ème siècle, inventeur du cirque moderne, est devenu, par la suite, je vous le donne en mille : un homme politique.