<<Poésie d'un jour
Le Retable d'Issenheim de Mathis Grünewald / source
La fontana
Il tuo sogno lustrale ! Poiché la pioggia lava
il mondo, e le sorgenti
balzano impetuose
dal suo cuore oscuro,
preparare un bacino per accogliere
l’innocenza dell’acqua… Con un gioco
di delfini, forse, o di candidi uccelli
nel bordo istoriato, e al centro volti di marmo
che da labbra enigmatiche
versino un instancabile sussurro.
La tua fontana mai compiuta, ed ora
con te perduta nella notte ! Tu solo
ne conosci il segreto, sei tu la sua conchiglia,
l’orecchio teso ad un perenne ascolto,
mentre vene invisibili traversano
nel profondo la terra senza nome
che racchiude colui
che fu Mathis Grünewald –
in una fossa d’appestati, fuori
delle mura di Halle.
Mathis Grünewald : source / wikipedia
La fontaine
Ton rêve lustral ! Puisque la pluie
lave le monde, et puisque les sources
jaillissent impétueuses
de son cœur obscur,
préparer un bassin pour recueillir
l’innocence de l’eau… Avec des ébats
de dauphins, peut-être, ou de pures colombes
sur la margelle historiée, et au centre des visages de marbre
qui de leurs lèvres énigmatiques
laissent couler un inlassable murmure.
Ta fontaine, jamais achevée, et à présent
avec toi perdue dans la nuit ! Toi seul
en connais le secret, toi-même tu es sa coquille,
l’oreille tendue à une écoute sans fin,
cependant que des veines invisibles traversent
en ses profondeurs la terre sans nom
où demeure celui
qui fut Mathis Grünewald-
dans une fosse de pestiférés, hors
les murs de Halle.
Margherita Guidacci, Le Retable d'Issenheim suivi de L'Horloge de Bologne, Traduit de l'italien et présenté par Gérard Pfister, Arfuyen 2024, pp.56, 57.
♦ Voir aussi Margherita Guidacci sur → Tdf
__________________________________________________
Note de l'éditeur
© Getty Images /
L'Horloge de Bologne : Le 2 août 1980 au matin, un terroriste inconnu déposa à la gare de Bologne une valise pleine d'explosif. La détonation eut lieu à 10 h 25 : à cette minute précise les aiguilles de l'horloge de la gare s'immobilisèrent et cette image, reproduite dans tous les journaux, devint comme un symbole du terrible événement. En cet attentat, le plus meurtrier qui ait jamais été commis en Europe, Margherita Guidacci reconnaît la terrifiante figure de ce siècle qui, à travers guerres, goulags et génocides, a porté la violence jusqu'à des extrémités encore insoupçonnées. Requiem pour notre temps, requiem pour une histoire tout entière marquée par l'héritage d'un même mal : " De la première étoile de sang naît tout un firmament. "
__________________________________________________