C’est donc reparti pour 3h de veille de nuit, avec la promesse d’un lever de soleil sur le grand bleu. Mais en attendant le soleil... tu en veux des étoiles filantes ? En voilà. Par dizaines. Jusqu’à extinction des feux, et apparition des premières lueurs de l’aube. Et avec elle, droit devant, apparaissent pour la première fois les côtes corses. D’abord fumeuses, indécises, éthérées, elles se précisent enfin avant de disparaître à nouveau dans l’humidité de l’aube. Nous ne les reverrons que 10h plus tard.
07h - Que regarder d’autre, maintenant que les étoiles se sont éteintes et que l’horizon s’est vidé ? La mer, encore et toujours, qui ondule, clapote, ondule, clapote. Tiens, un aileron. Un aileron ? Dauphins à bâbord ! Nous avons à peine le temps de réveiller les deux dormeurs et de nous jeter à la proue du voilier : les deux petits dauphins nous accompagnent une minute, sautant le long de l’étrave, et disparaissent aussi soudainement qu’ils sont apparus. Ca, c’est une rencontre qu’on n’oubliera pas ! Et alors que nous en avons encore plein les yeux et plein le cœur, à peine une heure plus tard, c’est le souffle d’une baleine que nous apercevons à quelques centaines de mètres de nous. Majestueuse, solitaire, elle reste quelques minutes en surface avant de replonger silencieusement dans les profondeurs.
11h - La mer s’est calmée et les deux terrestres malades ont repris des couleurs. Sans y croire plus que ça, nous mettons une ligne à l’eau, équipée d’un gros rapala spécial pêche au gros. Parce que mon papa, pêcheur de son métier, nous l’a bien dit : "pendant la traversée, c’est obligé que vous preniez un thon !" Bon, mon papa étant marseillais en plus de pêcheur, nous n’y croyons que d’une oreille, mais qui ne tente rien n’a rien, n’est-ce-pas ?
23h - Après presque deux jours de navigation, nous voici enfin dans le port de Calvi. Assommés par trop de soleil, ballotés par une mer pas toujours très calme, épuisés par une nuit morcelée, il n’est pourtant pas encore question de dormir : ce thon, il faut bien s’en occuper, maintenant qu’il est pêché.
Etoiles filantes, dauphins, baleine, thon, mon esprit fatigué ne sait même plus sur quel souvenir se fixer qu’il sombre déjà dans le juste sommeil du matelot débutant.