Caroline Sagot-Duvauroux / Canto Rodado

Publié le 26 août 2024 par Angèle Paoli

                  Poésie d'un jour

Photo: G.AdC 

In memoriam

Un lézard, une salamandre, un masque d’idiot, la gazelle. Tiens ! la bave de limnée, c’est en liant ça, une agglutinant, une colle ! Et puis ca recommence. C’est une colle, penser. Quand les mains touchent encore aux copeaux légers de l’histoire rabotée par les hommes.
En l’honneur sorti d’espèce, cuit à point, dit je suis un homme sans savoir ce qu’il dit.
Alors l’œil attelle ses mains soc ou sep et mancherons et l’âge.
Tout ! du dental au misérable.
Araires fronts et dos sursautent parmi les cantos.
Tout retentit, là sous la main qui sillonne.
De l’informe à l’informe en passant par la chose.
Et l’insolite ? Ce qui arrive.
Quand l’œil veut.

Alors la pâte lève, drue. Les ingrédients prennent au rêve et l’homme en teste longuement l’efficacité, la solidité, la souplesse. La chair. Longuement. Comme longuement Van Gogh méticuleux questionne l’épaisseur pour qu’une matière survive au désir. Et elle dure. Son éclat dure !
Honnêteté d’un métier dans les marges des gains de productivité.
Et le cœur désire désirer encore. Bien final, immatériel, né de fabrique et de glaise. D’une survivance de la matière, naît sans cesse et le désir. Poiein. Paradis dont le cercle rampant s’écarte.
Loin du mufflisme des colons, financiers et docteurs.

Alors l’homme pose sur le support de bois, sur le format de penser ce jour-là, la pâte qui tient son rôle. Et la matière livre sa rugosité d’écorce et sa délicatesse de peau.
Pendant que l’œil veut.
Une forme naît.

Et l’homme fabrique l’arbre en l’épousant. Pour que l’arbre ne meure pas. Pour que l’arbre ne meure que d’un crime non pas d’être. Pour que l’arbre totem survive à l’œil et aux mains dans
l’œil du prochain clampin qui abordera de l’œil, l’arbre.
Et l’homme accroche son visage à l’arbre. Non pour nommer l’arbre à son visage mais pour que visage d’homme, n’importe quel ce visage d’homme, continue d’envisager le monde.

Les nuages ? Les nuages. La physionomie du monde.

Caroline Sagot Duvauroux, Canto Rodado, « Le Refuge en Méditerranée », CIPM/ Spectres Familiers 2014, s.f.


CAROLINE SAGOT DUVAUROUX

■ Caroline Sagot Duvauroux
sur Terres de femmes ▼

Canto rodado, Centre international de poésie Marseille, Collection ‘‘‘Le Refuge en Méditerranée’’’, 2014, s.f.
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L’eau puissante ? (extrait de Aa Journal d’un poème)
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Caroline Sagot Duvauroux, Le Buffre (lecture de Tristan Hordé)
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Mais avant (extrait du Buffre)
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[Être serait-il le reflet d’une hypothèse… ?] (extrait de ’j)
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[Je dissone] (extrait de L’Herbe écrit)
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Le Livre d’El d’où (lecture d’AP)
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[La poésie ne traduit pas] (extrait du Livre d’El d’où)
→ (dans la galerie Visages de femmes) 
Le silence serait-il l’enjeu de la parole ? (un autre extrait du Livre d’El d’où)
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Une source (extrait d’Un bout du pré)
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Le Vent chaule (lecture d’AP)
■ Voir | écouter aussi ▼
→ (sur remue.net) 
« L’intime dehors » (une conversation du 23 août 2012 avec Caroline Sagot Duvauroux)
→ (sur Ta résonance
Cacophonie vs. polyphonie ou la musicalité de tout dans l’œuvre poétique de Caroline Sagot Duvauroux (par Serge Martin)