Alain Freixe / Quand l’automne dit non, c’est oui que j’entends

Publié le 03 septembre 2024 par Angèle Paoli

  <<Poésie d'un jour

                                                                                                                         

J’aime l’automne sans que je sache d’où que ça vient comme le
disait Françoise   au narrateur d’À la recherche du temps perdu.
Cela  s’impose à moi   comme le sourire    d’un ciel clos sur ses
nuages   que le vent dessoude    et bouscule.    Vent, réinventeur
de ciel,    ouvreur des grandes routes   du froid, celui des neiges
et des gels.   Déchiré et éclairé,   l’automne    va son allant   qui
est perpétuelle réserve,    retenue,    protection de soi,  de ce qui
fait son cœur,    porte qui bat    au sein du temps      par laquelle
j’aime à passer    et me perdre     en ces arrières qui sont devant.

                                                           *
Tremblements      obscurs,      passages     d’ombres,      brumes,
sombres parages,    j’aime cette     façon navrée     de porter    le
temps.     Cette manière qu’a l’air   de laisser venir sur le monde
la pénombre,    de laisser descendre     les ombres du soir, demi-
jour    où le décor se floute,     où le silence     prend possession
des lieux.    Les contours nets    et ceux déjà estompés palpitent
ensemble,    l’obscur ne dissout pas     les formes,      il les rêve
plutôt.

                                                            *
Des brouillards    miséricordieux     paressent     entre les troncs
nus     des arbres du Bois Noir   en contrebas de la route en leur
ajoutant     cette distance    qui les doue      de ce lointain où les
choses du monde se retirent.     Quelque chose       s’abandonne
non à     une présence vive    mais au contraire à quelque chose
qui s’est déjà     absenté.     C’est cette présence       enfuie que
j’aime.

Alain Freixe, Quand l’automne dit non, c’est oui que j’entends, Cahiers du Loup bleu, Dessin de Martin Miguel, Les Lieux dits 2022,pp.18,19, 21.

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ALAIN   FREIXE

Source
■ Alain Freixe
sur Terres de femmes ▼
Les mains heureuses, La rumeur libre éditions, 2022
→ Vers les riveraines (lecture de Sylvie Fabre G.)
→ Vers les riveraines (lecture d’AP)
→ À l’étrangère (extrait de Vers les riveraines)
→ [on serait à couvert sous les arbres] (autre extrait de Vers les riveraines)
→ Bleu plié au noir
→ Contre le désert (lecture de Michel Diaz)
→ Contre le désert (lecture d’AP)
→ Septième pas (extrait de Comme des pas qui s’éloignent)
■ Voir aussi ▼
→ (sur Terres de femmes) Serge Bonnery et Alain Freixe, Les Blessures de Joë Bousquet, 1918-1939 (lecture d'AP)
→ P/oésie, le blog d’Alain Freixe : La poésie et ses entours