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Les synesthésies attestent lese différences concernant l'intimité de l'expérience subjective : certaines personnes, qu'on appelle synesthètes, éprouvent des associations additionnelles arbitraires, idiosyncrasiques et automatiques : par exemple de couleurs à des sons, ou une couleur spécifique pour chaque chiffre ou ...
Synesthésie, ce mystérieux phénomène qui touche une personne sur cinq
envoyé par Jessica B......« Il m'arrive de mettre du tabasco dans un expresso. Je ne le conseille à personne, cela me donne généralement la nausée ! Mais le mélange de couleurs que je vois en le buvant est absolument fascinant », raconte Sean A. Day. Cheveux blancs caressant ses épaules et barbe blanche, ce professeur d'université américain a plusieurs formes de synesthésie : les instruments de musique, presque toutes les saveurs ainsi qu'une cinquantaine d'odeurs déclenchent chez lui la vision « d'une forme ou d'un objet d'une couleur particulière ». « Quand j'écoute du piano, je vois une sorte de brouillard bleu, très léger, avec de petites particules qui ne sont pas de l'eau mais du plastique », dépeint-il.
2, bleu ; 3, rouge ; 4, mauve ; 5, orange…
La synesthésie est un phénomène perceptif dans lequel une sensation objectivement perçue s'accompagne d'une ou plusieurs sensations supplémentaires, dans une région du corps différente de celle qui a été excitée, ou dans un domaine sensoriel différent, selon la définition donnée par le Grand Robert. Plus de 70 formes de synesthésie ont été identifiées. L'une des plus courantes, l'association « graphème-couleur », toucherait entre 1% et 4% de la population, mais jusqu'à un cinquième des personnes pourrait expérimenter une forme faible d'une synesthésie (1). De fait, beaucoup de synesthètes s'ignorent, jusqu'à découvrir, un beau jour, que cette particularité est loin d'être partagée par tous.
Pour Helen, le choc de cette découverte eut lieu pendant ses études en littérature française, lors d'un cours sur un fameux poème d'Arthur Rimbaud. Ce dernier, qui n'était peut-être pas lui-même synesthète, y attribue des couleurs aux voyelles : A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu… « Je n'avais jamais entendu le terme de synesthésie jusqu'ici et je pensais que tout le monde voyait les lettres et les chiffres en couleur. J'étais choquée d'apprendre que ce n'était pas le cas. Les autres étudiants me regardaient un peu bizarrement », se souvient cette Britannique de 41 ans. Chez les synesthètes, les associations se font involontairement.
Elles sont constantes et propres à chacun : Helen voit ainsi le 1 transparent, le 2 bleu, le 3 rouge, le 4 mauve, le 5 orange, le 6 jaune, le 7 rouge bordeaux, le 8 marron et le 9 vert bouteille.
Une origine disputée par les spécialistes
L'association d'un graphème avec une couleur est aussi la plus étudiée par la petite communauté de chercheurs qui tentent d'élucider les causes des synesthésies. Ces phénomènes subjectifs, non pathologiques, ont-ils des fondements génétiques, neurologiques ou développementaux ? « Pour la plupart des synesthètes, nous pensons que l'origine est génétique, rapporte Sean A. Day, qui préside l'International Association of Synaesthetes, Artists, and Scientists (IASAS) (2). Mais nous ne savons pas exactement quels sont les gènes impliqués. » « Il est tout à fait probable qu'un certain nombre de configurations génétiques favorisent les synesthésies mais c'est là un fait très général, les prédispositions génétiques et les influences de l'environnement n'étant pas vraiment dissociables », ajoute Jean-Michel Hupé, chercheur au CNRS.
C'est plutôt une origine développementale que privilégie ce scientifique, qui a travaillé pendant près de quinze ans sur les synesthésies. « Si on suit l'hypothèse liée à la mémoire, les synesthètes adultes pourraient se souvenir des alphabets colorés et autres jeux de lettres de leur enfance. Cela n'exclut pas un impact génétique qui pourrait être très indirect, via certaines capacités d'imagination et émotionnelle liées au patrimoine génétique », indique-t-il. L'hypothèse neurologique fut quant à elle très à la mode dans les années 2010-15 sur la base de données qui se sont relevées par la suite peu solides. « Les méthodologies et les techniques d'imagerie cérébrale utilisées en neurosciences ont de très fortes limites », rappelle Jean-Michel Hupé.