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Un autre extrait de Petite Lady

Publié le 27 août 2008 par Plume
En contre bas, à mi chemin de la clairière et du sommet de la montagne s’étendait le village sur plusieurs centaines de mètres. Accroupie derrière le rocher, Tess cherchait à apercevoir sa sœur et ses amis. Mais elle eut beau scruter la moindre parcelle de surface habité, elle ne les vit pas. Il fallait se rendre à l’évidence. Ils avaient dû être enfermés dans une des huttes en bois qui occupaient la cuvette entre les pans escarpés et la jungle. Elle contracta les mâchoires, extrêmement nerveuse, et tourna avec impatience la tête vers Percy Le Borgne, agenouillé à son côté, la crosse du fusil posée sur la pierre. Lui aussi observait les allers venus au village, immobile comme une statue, les sourcils froncés.   Elle était à sa merci. Elle le savait. Mais bizarrement il n’avait pas cherché à abuser de la situation, se comportant même d’une manière plutôt élégante pour un pirate. Sans doute parce qu’il ne lui semblait pas nécessaire de brusquer les choses. Il avait juste insisté un peu brutalement pour qu’à la place de sa robe déchirée, elle revêtît une chemise et un pantalon, deux fois trop grands pour elle mais maintenus fermement par une ceinture. Elle n’osait imaginer son allure dans une telle tenue mais force lui fut de reconnaître que c’était de circonstance pour circuler rapidement et sans entrave dans la jungle et la montagne avoisinantes. Percy Le Borgne lui avait susurré à l’oreille, sur un ton moqueur, qu’elle ressemblait assurément une très jolie Dame Pirate, à défaut de ressembler à une belle Lady des salons anglais … Avant d’éclater de ce même rire sonore et franc qui faisait fuir les oiseaux nichant dans les hautes branches. Elle avait tourné le dos, sans daigner répondre. Mais toute la nuit, les yeux grands ouverts fixés sur les étoiles, elle avait désespérément tenté d’oublier sa promesse …   « Où sont-ils ? Demanda Percy au pirate qui venait de s’agenouiller prés d’eux. -         Dans la grande case, là, sur la droite ! -         Bien. Tu prends tous les hommes avec toi et vous faites diversion. Pendant ce temps, Davis et moi, nous irons les tirer de là. Pas de quartiers, matelot, taillez-moi tout ça en pièces ! -          A vos ordres, capitaine ! »   Le pirate fit un signe aux autres. Silencieusement, ils commencèrent à descendre le versant de la montagne. Le dénommé Davis, un colosse aux cheveux longs, s’accroupit à côté de Tess. Elle ne put s’empêcher de frissonner de crainte quand son regard ténébreux s’attarda un instant sur elle. Elle préféra concentrer toute son attention sur la hutte dont avait parlé le marin. Ils étaient là. Des larmes embuèrent sa vue. Enfin …   Le soleil était haut dans le ciel quand Percy Le Borgne tourna la tête vers l’adolescente. Gênée par sa chevelure, elle venait de l’attacher avec une bande déchirée à sa chemise, ne sachant comment maîtriser sa rage et son angoisse autrement qu’en s’agitant à tout va.   « Nous y allons ! Les autres doivent être sur le point de faire diversion. Vous allez retrouver les vôtre, Miss Cunningham, et alors vous serez enfin à moi ! »   Il effleura sa joue frémissante. Elle se rejeta aussitôt en arrière et darda sur lui un regard furibond. Il eut un large sourire.   « Ah ! Toujours aussi farouche ! Vous me plaisez plus à chaque minute qui passe ! La colère donne à vos beaux yeux un éclat extraordinaire … -          Je vous accompagne ! Coupa Tess, feignant de ne pas avoir entendu. -          Vous ne venez pas avec nous, Miss. Vous restez ici avec une arme dans le cas où ça tournerait mal. -          Mais … »   Le visage de Percy Le Borgne se durcit singulièrement.   « Suffit. C’est moi qui commande, vous devrez vous y habituer. Et personne ne discute mes ordres. Vous restez là et surtout vous n’en bougez pas. Souvenez-vous qu’il n’est pas dans votre intérêt de fuir ! »   Tess frémit et referma la bouche, malgré elle impressionnée par le ton glacial de sa voix. Elle prit le pistolet qu’il lui tendait et se détourna, sans dire un mot. Percy Le Borgne eut l’air satisfait. Il fit signe au dénommé Davis de le suivre et entama prudemment la descente vers le village. Le cœur battant à tout rompre, Tess se calla contre le rocher, anxieuse, serrant si fort l’arme dans sa main que les jointures de ses doigts blanchissaient.

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