Magazine Humeur

En Amazonie, j’y étais !

Publié le 24 septembre 2024 par Georgezeter
Amazonie, étais

( Sur le Fleuve Maroni une lettre de Démission...)

http://bonbonlareunion.over-blog.com/2016/04/sur-le-fleuve-maroni-une-lettre-de-demission.html

En emménageant dans mon carbet, ces petites maisons de construction locale, le propriétaire me dit devoir partager mon espace avec un colocataire non payant, mais très utile pour mon quotidien. Dans la minuscule cuisine à la jonction du plafond et des deux murs d'angles, il me montre une araignée d'au moins 20 centimètres ; une Matoutou se tenant accrochée, tête en bas. Après l'effet d'effroi-surprise et en regardant bien, cette grosse bébête qui possède 8 ou 10 pattes bien velues, des gros yeux noirs bougeant en tous sens, des pinces et surtout le bout des pattes de couleur orange. L'avoir chez soi, c'est la garantie selon lui que tout être rampant se fera dévorer pendant la nuit par " ma " matoutou que je surnomme long legs. La nuit, ces bestioles partent en chasse et se remplissent de cafards, gros comme des boites d'allumettes, de fourmis, de rongeurs, de " trucs " volants indentifiables et même de rats, mulots et petits lézards nombreux sous ces tropiques. De plus, en bon voisin, jamais il ne lui vient à l'idée de faire un détour par mon hamac, et donc, me voilà cohabitant avec long legs pour le meilleur et pour le pire, sachant qu'il n'est pas venimeux. Certains voisins en arrivent même à les domestiquer et à les prendre dans leurs mains ; me concernant, je m'en suis abstenu et nous avons vécu notre histoire sans histoire. Toujours en parlant bestioles : les fourmis légionnaires. Ce sont des nomades qui se déplacent par centaines de milliers et lorsqu'elles bougent en rangs serrés, elles émettent un bruit caractéristique assez angoissant, comme des mandibules qui s'aiguiseraient. Si vous en repérez proche de votre carbet, attirez-les avec du miel versé en travers de l'entrée, puis faites une ligne sucrée qui traverse la maison. Rapidement attirées, elles vont envahir votre domicile, tuer tout ce qui peut être dévoré et ressortir à l'autre bout pour continuer leur quête. Mieux que l'aspirateur machin-truc à 1000 balles ! Un p'tit truc de broussard : la nuit, pour ne pas être embêté par les choses rampantes/volantes qui viendront vous chatouiller dans le hamac sous la moustiquaire, enduire de mousse à raser chaque bouts de corde qui le tient. Les rampants se retrouvent à s'enfoncer dans la mousse et s'étouffent...

Trekking en brousse : A Maripa Soula, la forêt enchâsse le village, et il est tentant pour un curieux d'y aller, plutôt d'y pénétrer. Toujours avec un guide, sinon, ce sera un aller simple. Souvent la balade commence sur une pirogue sur le fleuve. Le débit de l'eau en haute saison est si fort qu'on ne peut y aller qu'avec un piroguier qui s'y connaît : il y a des tourbillons qui aspirent, les fonds sont très profonds et les eaux sont habitées par des animaux qui se feront un plaisir de vous transformer en plat du jour. Toucher terre, est un travail d'experts, car, il y a peu de trous dans la végétation des mangroves. Un espace touffu à moitié immergé de branches, de troncs et d'une faune prédatrice, dont des serpents venimeux qui tombent des branches. Une fois " dedans ", l'humiditéassaillie comme une chape, et l'odeur de moisi domine. À ma surprise, c'est un lieu très sombre et bruyant. Il y a trois couches d'arbres qui s'élèvent à des altitudes différentes, la plus haute reste invisible. À tout dire, c'est assez angoissant comme endroit et donne l'impression d'avancer dans un tunnel sans fond. Avancer, c'est jouer du coupe-coupe et transpirer deux litres d'eau par minute. C'est là que moustiques et autres volants décident de festoyer sur votre peau, bien claire qui attire ces vampires. Un des " grands héros " de ces lieux est la sangsue... Animal du diable qui sait pomper à la moindre occase. Et puis le sol est gorgé d'eau, de boue, si bien qu'avancer c'est patauger, et sentir parfois sous les grosses bottes un truc non identifié qui bouge... Comme en plus, béotien que vous êtes n'y connaissez que pouic, ce qui fait la joie du guide qui se marre bien en voyant vos frayeurs citadines. L'Amazonie et sa rain forest, n'est pas une terre de branlotins !!! Alors, pourquoi y venir ? Parce que, ce sera une des rares fois de votre vie où l'impression de ne pas être à sa place fait foi. Tout autour est si fort, si ENORME, que cela vous replace où, vous êtes réellement ; comme un petit être balloté, qui ne pourra s'en sortir qu'à la volonté de sa tête ; comme une traversée en solitaire d'un océan ou sur le toit du monde. C'est ce que donne la fréquentation de la grande forêt. Pour finir sur une note joyeuse : Une des bonnes blagues du guide, me laissé passer devant, pour qu'une minute plus tard des milliers de petites araignées me tombent partout sur le corps, rentre dans ma chemise, mon caleçon, un vrai film d'épouvante qui m'a fait gueuler à être entendu jusqu'au Manaus... En fait, un type de petites araignées inoffensives qui a colonisé entièrement un arbre, et lorsqu'un inconscient passe dessous et tape dans une branche, toute la colonie tombe sur l'intrus pour le faire fuir, je dirais, mission accomplie mesdames, je me suis pissé dessus !

J'ai vu aussi : Kourou et son lanceur de fusée bien dressé vers les cieux, c'est un peu arrogant, mais ça le fait. À saint Georges Oyapoc, au sud, à la frontière du Brésil, ce pont construit sous les ordres de Chirac, qui a couté un bras et qui ne fait qu'aboutir dans la jungle impénétrable Brésilienne. Papaïchton, du bout du monde, son jour de festival et les pagnes des femmes. Arecume-Pata le village des Wayanas isolé, mais trop proche d'après eux. Au loin de Cayenne, les iles du levant : Papillon/Charrière, le capitaine Dreyfus, ces prisonniers oubliés des humains... Et ce bagne, rongé par la végétation, comme un pied de nez à l'horreur de la pénitentiaire, où, encore, est visible le socle en pierre de " La Veuve " ou si vous préférez de la guillotine qui trancha les têtes récalcitrantes. La Guyane, un bout de terre forêt, assoupi en sa torpeur moite, d'histoires de bagnards, d'exclus, de renégats ; avec ces senteurs de vase dues aux alluvions limoneuses charriées par des courants bouillonnants de leurs scories aqueuses... Des cadavres et des songes.


Retour à La Une de Logo Paperblog

Magazine