Mon cher Victor,
Comme je te le racontais hier, après être passée à l'école de mon SR3, j'ai fait un saut à l'IUFM pour rendre des livres. Il n'y avait pas un chat à part les ouvriers qui retapent une partie du hall d'entrée. Des bâches sur le sol. Une odeur de peinture fraîche. Après avoir déposé le bouquin à rendre dans le casier de ma formatrice, j'ai fait un petit tour dans l'IUFM, comme l'année dernière.
Sauf que cette année a un goût particulier : je sais que ne reviendrai pas. Du moins pas comme avant, car j'aurai tout de même une formation en T1 (ce sera d'ailleurs, très probablement, dès le mois d'octobre, c'est bien organisé encore tout ça...) et j'aurai à revenir dans les locaux.
J'ai erré dans les couloirs. Personne. Je sais qu'ils seront bien remplis, le 7 Juillet, quand les PE1 auront les résultats du concours. Pour l'instant, ils sont déserts et sentent "la fin de l'année". L'année prochaine, d'autres PE2 arriveront. Eux aussi connaîtront les joies et les peines de cette année de formation, les angoisses, les doutes, l'ivresse. La frustration, aussi, de n'être pas mieux formés. Tout se renouvelle. Quelqu'un me remplacera ici. C'est presque un cycle.
Je suis passée devant le tableau des PE2. Il était vide. Complètement vide. Plus d'emploi du temps, plus de planning des salles, plus de notes d'information du secrétariat pédagogique. Complètement vide. Puis je suis passée devant le Panneau des Relations Internationales. J'ai vu la liste des gens qui partiront à l'étranger l'année prochaine, si, bien sûr, ils obtiennent le concours. Je me suis revue passer ici il y a un an, sachant que le pass vers mon rêve d'Angleterre dépendait complètement de ma réussite au CRPE. J'étais angoissée. Je rêvais du concours régulièrement. Mon nom n'était pas dans la liste. J'ai regardé les noms de ceux qui partiront à Northampton l'année prochaine. Il y avait quatre candidats, pour deux places. Je suis contente, car l'année dernière, j'étais la seule volontaire à partir.
Cela signifie que j'ai été convaincante lors de la réunion d'informations. Première fois que je parlais devant 150 personnes, debout sur l'estrade de l'amphi. C'était impressionnant. Ma passion de l'Angleterre l'avait emporté et j'avais essayé de faire passer mon amour pour ce pays. L'année prochaine, deux personnes iront à l'université de Northampton et prendront le bus jaune. Deux personnes seront éberluée par l'excentricité des Anglaises et par la qualité (toute relative...) de la bouffe. Je leur souhaite d'être aussi heureuses que je l'ai été, moi.
Puis je suis passée devant les casiers. J'avais peur qu'ils soient déjà vidés et anonymés. Mais non. Nos noms étaient encore là. J'ai regardé pour la dernière fois si je n'avais pas encore quelques documents en retard à m'attendre. Je me suis dis qu'au fond, c'était la seule trace, pour quelques temps encore, de mon passage ici. Bientôt, plus de Mirabelle nulle part à l'IUFM.
Et je suis sortie.
Je ne suis plus en PE2.
Et ça fait tout drôle.