Mes souvenirs, 2

Publié le 15 octobre 2024 par Perceval

A Marseille, notre premier logement se trouvait tout près du vieux port. Je me souviens d'une glacière à la place d'un frigidaire, et il était donc nécessaire d'acheter un bloc de glace.

Très vite nous avons habité un immeuble récent, avec le confort moderne et la télévision, avenue du Prado, près de la basilique du Sacré-Coeur ; j'y étais louveteau. J'ai de bons souvenirs de camps, et de temps passé dans notre local attenant à l'église. Je me souviens de l'ambiance d'un magasin spécialisé quand, avec maman, nous achetions l'uniforme scout, et le matériel ( gourde, quart, sac à dos, etc..).

J'allais à l'école catholique des maristes Saint-Joseph, près de la place Castellane. Je crois n'avoir pas été excellent en classe, j'avais du mal à apprendre les poésies malgré les efforts de maman qui me faisait travailler...

Je me souviens lui avoir offert, pour la fête des mères, une boule à neige de Notre Dame de la Garde.

Toujours accompagné de maman, j'ai appris à nager à la piscine des Catalans, aidé d'une ceinture avec des blocs de liège qui étaient retirés, un par un.. Souvenir également, sous sa surveillance, de pêcher à la palangrotte.

De papa, mes souvenirs concernent le côté scolaire et des notes insuffisantes à assumer. Parfois le dimanche, visite avec lui de chantiers... Il est arrivé, une fois, une lettre qui annonçait une retenue avec convocation des parents par le professeur ! Quand nous sommes arrivés à l'école : le professeur se rend compte qu'il y avait erreur sur l'élève...

A Saint-Joseph, je servais la messe. Un frère mariste passait dans les classes pour nous parler du sacerdoce... Je me souviens, en bande dessinée de ma lecture de la vie du fondateur de cette congrégation éducative ( similaire aux jésuites). J'avais rencontré ce religieux ; il revenait me voir... Je ne me souviens pas de discussion avec maman à ce sujet. Forcément nous avions du en parler.

Pour ma communion solennelle ; maman était déjà malade - je ne me souviens pas de m'en être aperçu...- J'avais une aube blanche, beaucoup de monde était venu pour l'occasion, papi Vétillard, papi et mamie Haquet ; des cadeaux ( un appareil photo...), un grand repas dans un restaurant à Aix...

Maman est malade, maman est couchée. Elle me sourit dans son lit, mais elle tient des propos insensés, je ris... Sans-doute, elle devait délirer ; je ne me souviens pas m'être rendu compte de ce qui se passait...

Ensuite, je vais loger chez les Baris. Un jour, papa arrive chez eux, j'entends qu'il se passe quelque chose, je les rejoins et vois mon père qui me regarde, il pleure. Je fonce vers lui, et je crie " maman... " J'ai compris qu'elle était morte. Ensuite, je l'ai vue, étendue sur son lit. J'imaginais qu'elle allait se réveiller, je surveillais...

D'après papa, la nuit même de sa mort, ils ont échangé sur ce qu'ils allaient faire pendant les vacances.

Puis, il y a la messe, dans notre église. Il y a du monde, et les copains louveteaux en uniforme...

Je me souviens avoir dit à papa, que nous allions nous débrouiller, que je pourrais faire à manger ; que j'étais assez grand pour gérer ... Je ne me rendais pas compte du malheur qui allait, sur ma soeur et moi, forcément advenir... Je n'imaginais pas le manque, et surtout le contraste ...

Je me souviens de la gentillesse de gens autour de nous, des Baris, et même de la famille du médecin qui avait suivi maman, et qui habitait l'immeuble...

Pendant ce temps, Axelle était à Vence, dans une maison d'enfants où elle allait régulièrement en été.

J'écris tout cela, de manière abrupte, au fil des mots... Je ne m'aide pas de photos.... Sans-doute aurais-je d'autres souvenirs, si j'en consultais... ?

Je viens de tenter auprès de Josette, la sœur de maman, de me raconter quelques souvenirs quand elle était à Nice... Très âgée, je n'en tire pas grand chose ! Aujourd'hui Josette, se répète et revient très vite au temps du Havre, avant guerre... Elle évoque avec beaucoup de tendresse, son père ( mon grand-père maternel), pilote du Havre, qui a refusé de travailler avec les allemands et dû se cacher dans les alentours, et qui leur ont permis d'échapper ensuite aux bombardements américains, destructeurs de la ville. Maman et elle, ont sept ans d'écart ; Maman était sa grande sœur, et protectrice. C'était une intellectuelle, dit-elle. A Nice ; oui, maman était très maternelle, beaucoup plus qu'elle. Effectivement, Josette parle de la longue maladie de ma mère.

La mémoire nous permet d'abroger une partie de la flèche du temps... Nous revenons sur les images du passé, en tentant de le préserver pour qu'il persiste dans l'avenir. Il m'oblige à lui rester fidèle. Ma mère existera dans le regard que je lui porte. La mémoire est le signe de la filiation.

Où peut-on puiser, sinon dans une filiation, les ressources pour mieux se connaître ?

Un proverbe dit : " Quand tu ne sais plus où aller, rappelle-toi d'où tu viens. "

La filiation, ou la reconnaissance d'une lignée, permet de se reconnaître, et de transmettre. C'est mon objectif, ici, avec ces écrits.

Je fais appel à la mémoire collective pour comprendre notre passé commun.

Les récits historiques, par exemple, influencent notre perception des valeurs, telles que la liberté, la solidarité sociale.

Si dans une recherche de sens, je me suis inscrit dans une lignée. Pierre Teilhard de Chardin développe l'idée que la filiation ne se limite pas à la lignée familiale, mais s'étend à une filiation cosmique. Il voit chaque individu comme faisant partie d'un tout plus grand, où la transmission des connaissances et des valeurs contribue à l'évolution de l'univers vers un point d'achèvement qu'il appelle le Point Oméga. Une sorte d'union de toute la création en Dieu.