'' Le Graal existe t-il ? ''
Je reviens à la question de l'être : '' est '' = ce qui est réel.
La phénoménologie, me semble t-il, nous invite à approfondir la réalité des choses ; et examiner toutes les dimensions de l'être d'une chose.
Heidegger dirait que '' l'être de l'étant '' c'est la nature de la relation que nous avons avec cet ''étant'' ( un peu comme si je réfléchissait sur '' la vie de ce vivant'' .
La plupart des étants que nous côtoyons sont des outils : ils ont une fonctions utilitaire ; et l'être d'un outil ce n'est pas la subsistance de cette chose. L'outil n'est pas qu'une chose posée devant nous, l'être de l'outil est dans l'usage que nous en faisons.
L'être d'une chose est dans sa subsistance, il est aussi, et - en premier - dans la manière dont il se donne.
A noter que l'outil, n'est pas condamné à être un outil ; le mode d'être de la chose dépend de ce que nous décidons d'en faire : on peut s'asseoir sur un coffre, ou un rocher, on peut s'asseoir et profiter de l'ombre d'une arbre... L'être, comme outil, ne réside pas dans la chose, il réside dans le rapport à la chose.
La question essentielle, c'est l'être de l'humain. L'humain est-il un étant comme les autres ?
L'être humain, m'apparaît comme un étant qui s'interroge sur l'être ; et peut-être même, l'être de l'être humain est de se poser la question de l'être.
Il a la capacité de se questionner. Il ne peut donc se résumer à sa corporéité.
- Ok, je pense donc je suis... Descartes l'avait dit.
- Oui. Alors allons plus loin : Si l'être de l'homme est dans la conscience, peut-on ''substantialiser '' la conscience ?
- Descartes a dit : " l'homme est une substance pensante. "
- Il était dualiste : L'homme, comme être pensant, posséderait une nature constituée de deux substances distinctes : une substance pensante et une substance corporelle...
Husserl, rejette l'idée de Descartes, que la conscience serait une composante matérielle. Pour s'expliquer, Husserl propose ce qu'il appelle '' l'attitude transcendantale ''.
Je vais tenter de comprendre ce qu'il nous en dit : le monde apparaît à notre conscience, et nous constituons le sens du monde, à travers notre conscience. Il s'agit d'explorer comment nous donnons du sens aux choses et comment ce sens émerge de notre expérience.
Ce qui caractérise l'homme, en plus de sa conscience ; c'est qu'il n'est pas figé dans son être, comme on pourrait penser d'un animal ; sa conscience le rend capable de réinventer son ''essence ''.
Heidegger critiquait aussi la position de Descartes : il pensait que l'humain était d'abord un être engagé dans le monde, et que l'existence précédait la pensée. L'essence de l'humain résiderait dans son ''être au monde '', le '' Dasein ''...
- Mais .. ?! L'essence ne se distingue t-elle pas de l'existence, n'est-elle pas la nature véritable de l'être ? D'ailleurs, Husserl - dans sa méthode phénoménologique - suspend son jugement sur les contenus des phénomènes, afin de préserver leur essence ....
- En effet... Pourtant, pour Heidegger, l'essence de l'homme réside dans son existence.
Et Sartre rajoute : '' l'existence précède l'essence ''. L'homme n'a pas de nature prédéfinie ; il se définit par ses choix et ses actions.
- Edith Stein a encore une position différente, celle que je préfère : - l'essence est inséparable de l'existence concrète d'un être. L'essence n'est pas une abstraction, elle est une structure qui se manifeste dans l'existence ; elle réside dans la singularité de la personne, l'âme en étant le noyau.
- L'âme ... ? Comment les philosophes abordent cette notion ?
- Je dirais, pour Husserl que l'âme se déploie dans la conscience, elle représente notre subjectivité. Elle n'est pas une substance distincte du corps... De même pour Heidegger, pour qui l'âme est sans-doute liée au Dasein et à la quête de sens...
Edith Stein, rejoint Heidegger, mais rajoute que l'âme est le noyau dynamique de l'essence de chaque personne. Son intuition est que l''âme de l'humain ne serait pas que d'ordre naturel comme les autres vivants mais d'ordre proprement spirituel.
L'âme, par définition, impliquerait un espace intérieur dans l'organisme, humain ou animal.
Edith Stein souhaitait '' expliquer le mystère de l'existence humaine et surtout de son essence en devenir tout au long de sa vie libre et rationnelle.''
" Saisir le sens du réel " comme elle disait, consiste à articuler la rationalité philosophique à la vérité révélée.
Edith Stein adopte la méthode phénoménologique pour aborder le '' vécu de l'âme '' . Elle souhaite remplir cette notion d'un contenu d'expérience, et même '' redonner une pertinence philosophique à une notion devenue aujourd'hui très controversée.'' L'âme est " quelque chose qui peut nous apparaître et se faire sentir, tout en restant toujours pleine de mystère "
Edith Stein, en chrétienne, étend sa recherche dans le domaine de la personne pour passer " de la nature à la grâce ". C'est à dire passer à une anthroposophie ternaire ''corps-âme-esprit'' . L'âme aspire à une réalité au-delà de la nature. Nous le verrons plus tard...
Le Graal, est l'aboutissement du passage de la nature à la grâce. Il est une voie aux questions que je me pose et ne me pose pas encore. Le Graal représente l'existence de Ce qui ne peut se suffire à n'être qu'un objet physique. Le Graal se raconte et se transmet. Le Graal n'est pas le but, il est le Chemin.
Voilà, ce que Lancelot aurait pu répondre au libraire de Fléchigné.
Il aurait pu aussi parler de la Coupe, image du Graal.
Le Graal se reconnaît dans la Coupe du dernier repas qui annonce la mort, et la Présence vivante ( résurrection) de l'Homme-Dieu dans toute sa création. Je l'ai déjà évoqué, nous en reparlerons.