jamais je m'énerve

Publié le 31 août 2008 par Audine

Alors moi qui ne suis pas sûre d’être capable de faire un lien dans un billet, je suis taguée par Marie-Georges Profonde.

Taguée ça veut dire qu’on est obligé(e) d’écrire un truc, suivant les consignes qui sont données par l’auteur du tag, qui a lui (elle) même été tagué(e), et qu’après faut choisir des victimes, suivant le principe connu de la chaine, déjà inventé il y a des lustres par Max Ophuls dans son film « La Ronde », qui comme chacun sait ne parle pas d’une femme ayant des formes mais des risques de MST.

C’est vous dire si c’est engageant tout ça.

En l’occurrence, il faut parler de trois choses qui énervent le plus.

Donc je m’y colle, parce que tout le plaisir de ce genre d’exercice, est de refiler le bébé aux autres.

Je suis bien embêtée : je ne m’énerve jamais, je suis la reine de la zénitude.

Ca m’agace un peu que vous puissiez soupçonner que ce ne soit pas le cas.

Bien sur les gens sont constitutionnellement, génétiquement, ataviquement énervants.

Fut une période où je faisais un sort à un imbécile par semaine. Un imbécile, énervant donc.

Ca avait commencé par le type du courrier, qui se garait toujours sur la place réservée aux handicapés, devant la Cotorep. Il avait répondu à ma remarque qu’il n’en avait pas pour longtemps etc et à la place du mort, il y avait une espèce de blonde qui nous regardait discuter avec des yeux de pot au feu.

Il est donc entré dans la légende sous le nom de Tarzan du Courrier et sa Barbie.

Puis l’expérience a tourné court lors de l’interpellation outrée d’un quidam qui avait laissé son chien crotter en plein milieu des escaliers qui bordent la Maison pour Tous menant à la rue de la Méditerranée. La rue de la Méditerranée est une des rues que je préfère, d’abord parce qu’elle est hétéroclite, avec ses restos arabes, africains et chinois, ses coiffeurs africains pour cheveux crépus, son usine de parfums désaffectée, son école primaire et sa fresque murale qui, en trompe l’œil, fait croire que l’on traverse une terrasse de café sous des fenêtres fleuries et des curieux débonnaires. Au début de la rue, en venant des escaliers, il y a un portail sur lequel, au dessus de la fente de la boite aux lettres, une mystérieuse inscription indique : « ici, saucisse à l’ail ». Un peu plus loin, au pied d’une vitrine de boucherie, il est prié de ne pas crotter ici, et des traces de pas de couleurs acidulées sont peintes sur les trottoirs sans qu’on ne puisse déterminer exactement leur provenance ni même leur destination.

Le maitre crotteur s’était violemment tourné vers moi et m’avait dit, en se rapprochant tellement que je pouvais compter les poils de ses narines « mais vous êtes pas bien madame ?? », et un instant, j’ai cru qu’il allait me taper dessus et, même s’il était important à mon sens de combattre la bêtise ordinaire, je ne m’étais pas sentie suffisamment dévouée pour poursuivre l’expérience.

A l’époque, j’avais une relation essentiellement épistolaire, avec un ingénieur des mines en qui j’avais trouvé une sorte de challenger en matière d’absurdité.

Nous menions des conversations sur le Net, pour lesquelles nous créions un univers bien à nous, à la fois déjanté et un tantinet cruel, où nous devions faire preuve d’une adaptation extrême. Je crois que nous nous barricadions, afin que personne ne puisse pénétrer cet univers.

L’unité de mesure du temps était la tasse de thé et il y en avait de plus ou moins grandes, car elles pouvaient contenir de la tisane.

Nous égalisions les oreilles des chiens au laser, repeignions les planètes en rouge et y creusions des galeries pour y exposer mes tableaux, le moyen de locomotion était la baignoire et il ne fallait pas oublier de se munir d’une serviette de toilette.

Sur la planète rouge, nous y torturions les imbéciles et le Tarzan du Courrier y était ligoté sur une chaise, en attendant de connaître son sort et nous avions laissé la Barbie la bouche ouverte dans la voiture du courrier.

Notre chef d’œuvre fut un symposium, toute une nuit, au téléphone, sur la traduction mathématique des différentes positions pour dormir à deux. Il y avait les principales et les dérivés, les déclinaisons et les parallèles, les géométriques dans l’espace et je me demande si les voisins à l’occasion ne m’ont pas entendu hurler de rire.

Je regrette aujourd’hui que l’on n’ait pas mis les travaux de ce colloque téléphonique par écrit.

J’ai donc cessé de m’énerver après les gens, sous peine de mettre en danger mon intégrité physique.

Simplement, quand il l’est nécessaire, je ne m’énerve pas, j’explique. Notamment que j’ai raison. Plusieurs fois s’il est besoin, en variant le niveau sonore. A la hausse généralement.

Et quand l’interlocuteur est vraiment de mauvaise foi, il m’arrive de conclure « de toute façon c’est comme ça » avant de tourner les talons sans m’énerver.

Quand c’est la hotline de Numéricâble, j’arrive à dire calmement : « non mais vous prenez vraiment les gens pour des cons ». Pas de quoi s’énerver.

En dehors des gens, je ne vois pas ce qui pourrait menacer ma zénitude.

A part peut être le modem de Numéricâble quand il se met à clignoter n’importe comment.

Et les trucs à manger à ouverture facile. Parce qu’ils oublient de préciser si l’ouverture est plus facile avec une tronçonneuse ou avec une scie circulaire.

Ah. Et aussi moi-même souvent.

J’aimerai être plus zen.

Parce que je suis curieuse, on va se demander comment Balmeyer, PipoBanjo ! et Doudou s’énervent tout rouge.