Aujourd'hui ma fille a 8 ans et j'en profite pour ressortir un texte du temps de GUCCIQUEEN, après BOOMSCHLACK et avant SERIES.
À mes 30 ans, ma grand-mère est allée acheter des bougies de la Sainte Rita. Vieille tradition familiale. Nous les avons faites brûler consciencieusement et, dans ma tête, j’ai répété « un homme, un bébé, un homme un bébé »
Deux mois plus tard, je plaquais tout à Paris et aller m’installer à Aix.
Ma grand-mère dans le même temps est décédée d’une rupture d’anévrisme. Pan ! comme ça, sans dire au revoir. Nous avons bien bu les jours qui ont suivi son enterrement et j’ai continué sur ma lancée, désoeuvrée de sa perte, du No Man’s land de ma vie. Je cherchais mollement du taf, je sortais bcp.
C’est au Vian, à Marseille, que j’ai vu pour la première fois H. J’en étais à mon dixième rhum gingembre. La musique vrillait mes oreilles. J’ai vu un Prince entrait dans les lieux. Je suis repartie avec lui. Nous sommes donc restés enfermés une semaine, à fumer, boire, faire l’amour et parler de nos vies. Je me suis accrochée à lui comme à une bouée au cœur du naufrage. Lui qui était en situation irrégulière, sans travail et complètement parano.
Nous étions aveugles dans notre malheur. Tellement différents et si proches…
Un jour que nous faisions l’amour j’ai eu comme un flash. Je sais que c’est ce jour-là que je suis tombée enceinte. La prise de sang me la confirmée alors que j’avais à peine une semaine de retard. J’avais souhaité un enfant de tout mon cœur. Pour moi c’était la seule raison de continuer à rester sur cette terre. La seule raison valable pour continuer. J’appréhendais de l’annoncer à H. Mais il est monté dans le bateau avec moi.
Nous nous sommes découverts à travers cette grossesse. Pour le pire et le meilleur. C’est un des plus beaux moments de ma vie avec moi-même. Je n’ai jamais plus autant aimé mon corps que pendant ces 9 mois. Je n’ai jamais dormi avec autant de plaisir. J’ai été très sage. No alcool, No drugs. Ne travaillant pas, j’ai été à l’écoute de moi-même, de ce petit être qui grandissait en moi.
Le père ne mon enfant m’a lâché à plusieurs reprises, puis nous avons été ensemble jusqu’au bout de l’aventure. Je lui ai fait vivre cette attente à l’occidentale à lui le Marocain qui pense que l’Homme est supérieur à la Femme. Il m’a interdit le porc. Il m’a accompagné qu’une fois à l’écographie parce que c’était un homme qui m’oscultait et que ça le rendait dingue. Moi, j’ai pleuré en voyant ma crevette hyper active. Je n’ai connu son sexe qu’à la dernière écho : une fille.
Loubna, essence du parfum, mélange de deux mondes, la berbère aristocrate.
J’ai aimé quand mon ventre a été vraiment proéminent parce qu’il l’était enfin pour de bonnes raisons. Je lui ai parlé beaucoup, lui expliqué tout sur tout quand j’étais triste ou heureuse. Je prenais soin de moi pour elle.
Puis une nuit ça a commencé à tirer de partout. J’ai fait couler mon bain. Mon cousin et H. m’ont accompagné à la clinique. Ma mère nous a rejoint.
Le travail a duré 48h : aucun souvenir de la douleur.
J’ai eu une injection pour ouvrir le col, j’ai dormi à la clinique, on m’a fait une péridurale, le col ne s’ouvrait pas, césarienne en urgence. Sur la table d’opération, je sentais qu’on tirait quelque chose de mon ventre, reinjection. Puis elle est sortie ! Le médecin a fait une vanne du style « C’est un garçon !! », la bouche enfarinée « J’ai dit :ha bon ??? » et j’ai vu ma Chôse passée sous mon nez, je lui ai fait un bisou baveux. Elle est allée rejoindre son père. Le regard qu’il a posé sur elle ne me fera jamais regretter de l’avoir conçue avec lui. Elle est restée figée elle aussi. Un ange est passé et ils sont partis.
Ma première nuit avec elle j’ai pleuré. Je me suis rendue compte de ce que j’avais fait : mis au monde un petit d'homme. J’ai vu défilés les Dutroux, les guerres, les maladies. Je me suis promis de la parer contre toutes les agressions. Qu’elle soit forte dans la vie.
Depuis, l’histoire avec H. s’est mal terminée.
Mais la Vie avec Loubna reste l’Essentiel.