<<Poésie d'un jour
" j’aime les traces qu’ils ont laissées en moi"
Photo: G.AdC
Je suis homme à la mer celle où plongeait mon
petit corps d’ennui c’était les glaces
et les méduses embrochées sur nos rires
les matinées de sel sur les marches d’églises
que personne ne fréquente plus et pourtant
je n’ai souvenir que du soleil et de ce qu’il
donnait à nos peaux peut-être un peu aussi
de certains grains de sable et de vélos trop grands
homme à la terre revenu maintenant je compare
le temps enfant dont rien ne reste et mes nuits
aujourd’hui dont mon corps se repent.
D’autres aux élans sombres de leur peine préféraient
masquer les beaux visages que leur faisait la pluie
en carénant les doutes où ne naviguent clairs
que les rejetons pleutres or au-devant des mots
avançaient les sirènes que personne n’appelait
et ceux qui se cachaient aussi prenaient distance
d’avec les oiseaux et tous les bruits du soir
dans tout cela les jeux faisaient couture et l’or
des vêtements trop courts ajustait ses faisceaux
sur les regards perdus que nul ne visitait
alors un autre jour.
Je ne parle jamais parmi eux de ces ombres
qui colorent en lambeaux les histoires que j’écris
pourtant avec les doigts pleins de miel comme aux jours
où ils m’étaient les seuls je chante à perdre corps
et comme des bas-fonds pour leur dire que j’aime
et que j’aime les traces qu’ils ont laissées en moi
et que d’eux je ne prends que ce qu’ils m’ont offert
et que c’est bien assez et que je suis ingrat
et j’attends que s’apaise ma honte et que le temps
fasse de moi celui qui arrive à pas lents
et se repose enfin.
Maxence Amiel, Parmi eux, Dessins Alain Dulac, L’herbe qui tremble 2025, pp. 14, 15, 49