Je m’appelle Hugo Bourque.
Je suis le p’tit gars à Richard à Joseph à Hénérie de Lavernière, aux Îles de la Madeleine. Je suis un acadien fier de ses racines, de son accent et de son insularité. Les Îles sont reconnues pour être un lieu très touristique. Mais il ne faut pas se faire des accroires : vivre aux Îles, c’est plus que d’hiberner jusqu’à ce que le touriste arrive pour nous observer comme si on était un troupeau de marsouins.
Vivre aux Îles, c’est quoi?
Pour moi, c’est d’abord la liberté. La liberté d’aller à peu près où tu veux, quand tu veux… même si aujourd’hui, plusieurs se sont acheté une vie privée à grand coup d’affiches et de clôtures champêtres.
Vivre aux Îles, c’est les feux de camp sur la plage. On s’installe sur des courtes-pointes qui sentent encore la boule à mites, pis on chante du Paul Piché et du 1755. Tout ça accompagné d’une bonne bière, de bons amis… et de maringouins voraces.
Vivre aux Îles, c’est une poutine au Decker Boy, un bâtonnet à l’ail à La Patio et un dîner de côtes/poitrine au Dixie Lee… tout ça en une journée. C’est donc aussi les artères bouchées à 80 %.
Être bercé par la mer
C’est d’être entouré d’une mer assez généreuse pour se laisser jouer dans les entrailles pour nous permettre de gagner notre vie ou tout simplement pour notre bon plaisir. Plaisir d’une petite sortie entre amis pour aller pêcher du maquereau, et le manger à bord du bateau sous un soleil couchant. D’où l’importance de respecter la mer : elle peut à tout moment refermer la main avec laquelle elle nous berce et nous garder avec elle pour l’éternité.
C’est partir chaque dimanche après-midi, la musique country dans l’tapis, pour aller faire notre traditionnelle p’tite drive. C’est le moment pour les péteux de l’île centrale d’aller voir un brin ce qui se passe aux extrémités en se disant : ah ben whate traille qu’on n’avait pas passé par ici!
Une communauté d’insulaires
C’est se réunir autour d’une bonne game de 150, les soirs d’hiver, quand il fait frette. Et si la tempête poigne, on change de jeu, et on sort le O-K-O. 5 cennes la game, pis envoye par là! Au djâbe la dépense!
Vivre aux Îles, c’est les convois pour aller au Havre, c’est la Mi-Carême, les festivals, les symposiums, la musique; c’est les palabres, c’est connaître à peu près tout le monde ou s’imaginer qu’on les connaît; c’est faire confiance, c’est la sécurité. Vivre aux Îles, c’est le tissé serré, la couenne dure, la « va comme j’te pousse »; c’est les « whate traille », les « godêche » pis les « c’tu fâ? ».
On entend souvent dire que les Îles sont loin. Moi, je vais vous dire que tout est une question de perspective. En regardant tout ça, j’ai souvent l’impression que c’est plutôt moi qui suis loin.
*** Les articles de la série BEST OF, sont tirés de mes recueils. ***
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