Paranoid Humanoid

Publié le 08 septembre 2008 par Sebika

Et bien tu ne l'auras pas.

Les jours se succèdent, les uns après les autres, faisant face à la monotonie du quotidien…
La fidèle routine du « métro, boulo, dodo » reprend ses droits et l’on se surprend parfois à machinalement arracher veste et sac à leur langueur habituelle, à enfourcher les marches (à défaut d’un balai) et l’on se retrouve catapulté dans la rue. Sans défense.
Cette même rue que la veille.
Avec les mêmes arbres.
Les mêmes odeurs.
Le même vent.
Le même soleil.
Les mêmes bêtes à concours.
Les mêmes parisiens.

Dans cette jungle monocorde se glissent pourtant chaque jour de petits détails florissants. Infimes. Subtils.
Parfois magiques. D’autres cruels.
L’insolite a une place de choix dans cette routine soudain déchirée…

La Madone - E. Munch, 1894.

Cette journée écoulée fut marquée par le sceau de la douce paranoïa.
Celle qui te prend quand tu sors de chez toi, arraché à la douceur du foyer (oui, bon).
Celle qui prend ses racines au sortir même de ton immeuble, lorsque tu pousses la porte et aperçois un regard, un sourire.
Dès lors tu sais que ce sera ta journée paranoïa.
Partout. Partout les gens te regardent.

Au début, tu crois que tu es sorti(e) en chaussons, alors tu vérifies, au cas où.
Et puis non.
Alors tu crois que ta braguette est restée ouverte, par mégarde.
Non plus.
« Mince », je me suis lavé le dents c’est vrai » et d’essuyer frénétiquement une hypothétique trace de dentifrice au coin de la lèvre, sans réel succès.
« On » te regarde toujours.
Les filles, les garçons, les hommes, les femmes, les vieux, les vieilles, les gros dégueulasses, les enfants, la mamie au caniche, le dernier android tektonik, le geek à lunettes, le mec qui fait la manche, le chauffeur du métro.
Tous.
Ils te mattent et tu ne sais pas pourquoi.
Pourtant, tu ne vocifères pas à tue-tête dans le wagon. Tu te te grattes pas le nez (ni d’autre organe), tu es habillé (bon, tu vérifies une dernière fois au cas où tu aurais oublié de mettre le haut ou si ta jupe n’est pas pas hasard coincée dans ton slip – même si tu es en jean, on ne sait jamais).

Et puis non.
« On » te regarde toujours.
Sans agressivité. Avec même un soupçon de joie de vivre.

W. Kandinsky - Composition VIII, 1923

Et c’est la révélation. Tu regardes autour de toi et tu t’aperçois que non seulement tu souris comme une conne, mais qu’en plus, tu es la seule à être habillée avec des vêtements colorés.
Même pas un déguisement, non, rien.
Juste un pull rayé rouge et violet.
Un rien suffisant pour te démarquer dans la tristesse quotidienne.
Avec ton sourire à la con.
[A la naissance on a oublié de me filer une dose de méchanceté. La machine était en panne. La méchante fée a décidé de me faire payer en m’oubliant.]

Alors je me balade avec le sourire aux lèvres.
La couleur aux joues.
Les bleux de l’âme gardés au fond de soi.
Et de faire sourire à son tour.

J’attends ton sourire en retour.
Rien qu’un sourire.
Rien de plus.

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