Ségolène Royal, Bertrand Delanoë, Martine Aubry : au moins trois poids-lourds semblent tout à fait déterminés à prendre le contrôle du parti en novembre prochain.
Faut-il pour autant être candidat au poste de Premier secrétaire ?
Au moins deux des trois personnalités sus-nommés semblent le penser, au nom du criant besoin de leadership à gauche, du manque d'opposition audible au sarkozysme et de la demande pressante d'une grande partie de l'électorat de l'opposition.
Ici même, on ne s'est pas privé d'affirmer voire de théoriser la nécessité absolue en Ve République sarkozyste de désigner un leader fort capable d'incarner l'alternative à Sarkozy.
Je n'ai pas changé d'avis sur le principe général. Maintenant, si l'on quitte la stratégie générale, pour s'intéresser à la tactique à court terme, un doute m'assaille: que va-t-il se passer lors des élections européennes de juin 2009 ?
Pour les grands partis de "2e tour", les élections européennes sont les élections-pièges par excellence. On se souvient au moins de deux victimes célèbres:
* Michel Rocard en 1994 mène la liste du PS. C'est un cuisant échec. Il ne s'en est jamais relevé.
* Nicolas Sarkozy en 1999 conduit une liste RPR alliée aux libéraux de l'UDF. Catastrophe: le pôle souverainiste Pasqua-Villiers bat la liste chiraquienne "officielle". Sarkozy s'en est relevé mais il a fallu pour cela l'incroyable concours de circonstances du printemps 2002.
Que va-t-il se passer pour le PS en juin 2009 ?
Tout talentueux/se que soit le/la nouveau/nouvelle secrétaire du PS, il n'aura que 6 mois pour remettre en ordre de bataille un parti, dans lequel les perdants risquent de continuer à fulminer dans leur coin (comme pendant la campagne présidentielle de 2007). Pourra-t-il dans ces conditions, en plus, redresser suffisamment l'image détériorée du parti dans l'opinion ?
D'autre part, il se confirme que la concurrence risque d'être rude, les adversaires sérieux et potentiellement plus nouveaux ou plus attractifs pour les anti-sarkozystes pavloviens que nous sommes... - et n'oublions pas que l'élection européenne est par excellence une élection sans pression majoritaire, où l'électorat n'a de scrupules à s'éparpiller -
Une première liste non exhaustive a déjà de quoi faire frémir le PS:
* Le NPA et Besancenot: tout nouveau, tout beau, un nouveau parti qui relance la gauche de la gauche, adossé à la personnalité populaire comme jamais de Besancenot.
* Un pôle écologiste renouvelé avec Cohn-Bendit à sa tête qui pourrait aller de Bové à Hulot. Trois personnalités capables de siphonner une bonne partie de l'électorat PS.
* Bayrou et le Modem qui sont déjà en campagne pour les européennes ! Cette élection va être décisive pour relancer le mouvement centriste, après l'échec des municipales. Après une période de creux, Bayrou est de nouveau très écouté par l'électorat de gauche. Il a été à plusieurs reprises l'opposant le plus en pointe contre plusieurs initiatives récentes des sarkozystes (EDVIGE, affaire Tapie, laïcité).
Si ces trois forces parviennent à s'organiser (et ça semble en bonne voie même pour les écolos), je ne donne pas cher de la peau du PS en juin 2009.
Et vous pouvez déjà imaginer ce qui va se passer le soir des résultats: remise en cause du / de la Premier secrétaire fraîchement élu(e), retour sur le devant de la scène des forces vaincues en novembre, retour de la guerre des chefs jusqu'à la veille de l'élection de 2012, etc. etc. Et on retrouvera la même configuration que pour l'échec cuisant de 2007.
Le piège a déjà commencé à se refermer et je ne vois pas bien comment éviter ce nouveau fiasco.