En effet, de la même manière que les peintres commencent à dessiner d'une
seule couleur l'esquisse d'un homme et ensuite l'épanouissent en ajoutant
couleur sur couleur, pour conserver la forme de ce qui est représenté jusqu'au
moindre cheveu, de même aussi la grâce de Dieu, par le baptême, commence à
restaurer les traits de l'image, pour les ramener à l'état où ils se trouvaient
lorsque l'homme fut créé. Et quand elle nous voit désirer de tout notre être la
beauté de la ressemblance et nous tenir nus et sans exaltation dans son
atelier, alors elle épanouit en nous vertu sur vertu et élevant l'âme de gloire
en gloire, elle met en elle les traits de la ressemblance.
Ainsi donc, la perception qu'en prend notre esprit révèle que nous nous
transformons à la ressemblance, mais c'est l'illumination de la grâce
qui nous fera connaître la perfection de la ressemblance. En effet, toutes les
autres vertus, l'esprit, progressant selon une mesure et un rythme
inexprimables, les reçoit par le sens, mais la charité spirituelle, on ne peut
l'atteindre que si on est illuminé en toute plénitude par l'Esprit Saint. Car
si l'esprit ne reçoit pas en perfection la ressemblance, par l'effet de la
lumière divine, il peut bien posséder presque toutes les autres vertus, il
reste cependant privé de la charité parfaite.
En effet, lorsqu'il a été rendu semblable à la vertu de Dieu, autant qu'il est
possible à un homme, alors, il porte aussi la ressemblance de la charité
divine, De même en effet que, dans les portraits, tout l'éclat des couleurs,
ajouté à l'image, conserve jusqu'au sourire la ressemblance avec le modèle, de
même chez ceux dans lesquels la grâce divine reproduit la ressemblance divine,
l'illumination de la charité, si elle s'ajoute, révèle que l'image a totalement
atteint la beauté de la ressemblance. Car l'impassibilité, aucune autre vertu
ne peut la procurer à l'âme, sinon la charité seule. Car l'amour est la
plénitude de la loi (Rm l3, 10). Ainsi, donc, notre homme intérieur se
renouvelle de jour en jour dans le goût de la charité et il trouve sa plénitude
dans la perfection de la charité.
Saint Diadoque de Photicé : Les propos
ascétiques. Cent chapitres.