Cependant qu'en nous tous l'autruche claque du bec, du sable plein les amygdales, cependant que nous nous réincarnons pesamment sous la forme fouisseuse de la taupe empressée à fuir le soleil de l'évidence, cependant que ... Ah mais ... Trop tard ! nos maigres avoirs glissent le long des murs aveugles de Wall Street, le monde lui s'habille de gros drap brun, s'ajuste à la manche un brassard et lisse d'un crachat la mèche plate de triste mémoire.
Demain nous pleurerons, mais demain, pas avant. Quand sous la férule de chefs inspirés nous écrirons en revisionnement, les pages honteuses de l'Histoire avec un H aspiré, que le lait amer des prévisions nous dicte d'expérimenter avant que de crier, indignés : Plus jamais ça !
Plus jamais de soupes populaires ! Plus jamais de camps ! Plus jamais de victoires électorales célébrées, orgiaques, au Foutriquet's ! Plus jamais d'étoile jaune ! Plus jamais de doigts pointés sur la poitrine d'enfants violés ! Plus jamais flétris par l'horreur ! Plus jamais de peuples laissés à l'abandon sur des terres éventrées par la cupidité ! Plus jamais de mouroirs barbelés ! Plus jamais de routes fusillées ... Plus ... Plus ... Jamais ! Ah ? Mais trop tard !
Je viens de brûler le dernier de mes livres d'histoire. Celui duquel lâchement nous extrayions les dates symboliques en les gravant dans les courants d'air suffoquant. 1914/1918/1929/1936/1939/1940/1945/1962/1973/1976/1981/1995/2002/2007/200...
Je viens de brûler mon dernier livre d'histoire, d'effacer la mémoire vive de nos fuites en avant. Je ne veux plus me souvenir que la rue n'appartient plus qu'à la vidéo-surveillance. Je ne veux plus me souvenir de ce qui nous attend ! Je ne veux plus me souvenir de ce que nous attendons encore une fois, en brebis accroupies dans la litière de nos excréments maigres. Car voilà que suinte de nos cervelles endolories le gras dans lequel l'espoir nous a confiné.
Bye Bye citizen !