Magazine Journal intime
C'était à Prague en mai 1990.
Publié le 23 septembre 2008 par Sarah Oling
Parfois, une rencontre fait basculer le cours du temps, redonne force et vigueur à des émotions que l’on croyait oubliées. Une photo reçue en noir et blanc, un
violoniste, dont seule une main tenant l’archet et un regard tourné vers un inaccessible espace étaient perceptibles, induisirent ce basculement. Soudain, à sept heures ce
matin, cette photo posée devant moi, j’étais revenue à Prague en mai1990, sur le Pont Charles. Le texte que j’écrivis alors, assise à même les pierres du pont, je le confie au souffle du temps
pour qu’il vous parvienne. Juste un moment de grâce…
Vaclav
Te souviens tu de ce violoniste au regard lointain
Perdu parmi la foule?
C'était par un de ces matins de cendre et de feu
Prague resplendissait...
Tant de lumière répandue sur le pont Charles...
Il saisit son archet avec une douceur infinie
Magie des premiers accords, intensité de son regard,
Murmure de la Moldau
Caressant les pierres du pont
Tout me revient, loin, si loin de Prague...
Même le bruissement des ailes du vieux cygne
Passant majestueusement sous l'arche
Le temps s'est arrêté un matin de mai
Sur le pont Charles
Et je sais que jamais je n'oublierai ce violoniste
Ni ses mains
Prolongement magnifique de son archet
Secrètement je priais pour que dure encore cet instant d'éternté
Quand il me fallut partir, je pris l'une de ses mains
Et la retint longuement
Son sourire lumineux fut son dernier cadeau
Il savait que nous étions désormais
Indéfectiblement liés.