C’était elle ( texte de gballand )

Publié le 01 octobre 2008 par Mbbs

- Pourquoi me regardez-vous comme ça* ?
- Je ne sais pas moi…  parce que je vous trouve belle !
- C’est ça, foutez-vous de moi en plus, je ne vous dirai rien ! Et elle lui tourna le dos ostensiblement.

Il n’avait jamais rencontré une fille aussi piquante, au sens propre, mais il préféra ne pas lui répondre, faire comme si de rien n’était, et la suivre du regard à distance. Elle ne devait pas être de ces filles qui se laissent engluer dans le miel d’un discours. Il survola le rayon littérature étrangère sans la perdre des yeux.

Belle, elle ne l’était pas au sens classique du terme, mais elle avait touché son âme. L’expression peut paraître grave, mais c’est de ça qu’il s’agissait. Elle avait soulevé une petite pierre, là, au creux de l’enfance, et ce qu’il y avait sous la pierre venait de sortir de l’ombre.

Elle alla au rayon BD, il la suivit ; elle se dirigea vers le rayon CD, il lui emboîta le pas, mais elle stoppa net au milieu du rayon DVD et fit volte-face.

- Vous n’avez rien de mieux à faire que de me suivre ?
- J’ai décidé de vous consacrer ma journée.
- Vous m’avez demandé mon avis ?

Il parut surpris, ne répondit rien et elle continua.


- Il faut toujours demander aux femmes leur avis ! La prochaine fois, vous saurez !

Et elle le planta sur place sans qu’il ait eu le temps de lui dire qu’elle ressemblait à la femme qu’il aurait voulu aimer.

* phrase extraite d’une nouvelle de Jacques Sternberg « La Bifurcation »