Magazine Journal intime

Le Doux-Zéphir

Publié le 17 juillet 2007 par Stella

Il y a quelque temps, je disais ici même quelques mots sur un bateau du temps de mon enfance, le Doux-Zéphir, qui mouillait à l’année dans le bassin à flot de Saint-Martin-de-Ré. Repassant dans ma mémoire la silhouette de ce navire bien-aimé, j’ai eu envie d’en revoir quelques images. Mais ô désespoir, d’images point. Pas la moindre petite photographie dans mes boîtes en carton, mes albums plastifiés, mes paquets mis en vrac. Il faisait à ce point partie des “meubles” que jamais je n’ai imaginé qu’il pourrait disparaître. Je n’ai pas cru bon de lui tirer le portrait, pas même pour exercer mes talents avec mon instamatic tout neuf. Dommage…

C’était probablement un thonier ou un langoustier. Dans ma mémoire, il a un beaupré, un grand mât et un mât d’artimon à l’arrière. Aujourd’hui, il aurait un chic fou et naviguerait les jours de fêtes sous le label “vieux gréement”, mais à l’époque, il ne valait pas plus cher qu’une coque de noix. Je ne l’ai jamais connu dans ses fonctions initiales. L’été, il servait de crêperie pour les touristes. Il passait une partie de l’hiver en cale sèche, à se faire rafistoler. Les mauvaises langues disaient qu’il manquait couler chaque année lorsqu’on le manoeuvrait de son anneau d’attache, près du pont de pierre, jusqu’au gril de carénage. Cette idée ne manquait jamais de me causer un petit pincement au coeur lorsque je parvenais, de haute lutte comme il m’en souvient, à me faire emmener manger une crêpe en soirée. C’était pour moi une vraie fête, car c’était rare. J’y suis peut-être allée deux ou trois fois en douze ans de résidence sur le port…

C’était un endroit charmant, qui sentait bon l’encaustique. Les convives étaient protégés par un immense tau bleu roi qui claquait fort à chaque souffle de vent. Les table, le long des bastingages, étaient dotées d’une petite lampe très romantique. Les serveurs circulaient à l’intérieur, le long des mâts. Les cuisines étaient à l’intérieur de la coque. Rien à voir avec les normes européennes… et c’est peut-être pour cela qu’il a fermé et disparu du bassin de Saint-Martin. C’est bien dommage, quoique les mauvaises langues - toujours elles - disaient qu’on y dînait fort mal.


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