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Sa mère la tira

Publié le 21 octobre 2008 par Unepageparjour

Début du Rosier de Julia

Sa mère la tira de sa torpeur en frappant à la porte de la salle de bain. Julia se releva vivement, paniquée, ne sachant que faire. Elle s’entoura comme elle put d’une serviette, sortit du bain, toute dégoulinante d’eau et ouvrit à Jeanne. Son cœur battait. Que pouvait-elle expliquer ?

Jeanne commença à frotter sa fille avec la serviette, pour l’essuyer d’avantage, craignant qu’elle ne prît froid. Elle lui astiquait la tête de manière énergique, les épaules, le dos, le ventre.

Soudain, alors que la serviette, en s’écartant, laissait entrevoir un peu de peau, Jeanne poussa un cri.

Qu’est-ce que tu as, là ?

Julia se raidit. Elle attendait. Un drame. Quelque chose. Elle en savait pas.

Regarde, Julia, mais regarde, tu es toute rouge, là, sur le côté.

Sa mère l’examinait avec attention. Julia regarda à son tour. Son côté droit était légèrement rouge, un peu boursouflé, comme si elle s’était frottée sur une couverture de gros drap, en laine de chameaux, aux poils durs.

Le rosier avait disparu !

Ce n’est rien, maman ! Disait doucement Julia. Ce n’est rien.

Sa mère lui sécha les cheveux, l’embrassa sur le front, et lui demanda de s’habiller bien vite, afin de ne pas tomber malade. Elle l’emmènerait à l’école, dans l’après-midi. Aussi, il leur fallait être belles, l’une et l’autre.

Julia enfila ses vieux vêtements de la veille. Puis, repensant à ce que sa mère venait de lui dire, elle se déshabilla. Elle avait décidé de lui faire plaisir et partait à la recherche d’une jolie robe dans sa valise. Elle sentit que quelque chose se passait dans son corps. Son rosier demandait à sortir. Elle le sentait, comme si elle avait eu envie de s’étirer. L’envie d’ouvrir ses feuilles, de déployer ses branches, de pousser son tronc. L’arbre faisait maintenant partie d’elle. Elle le contrôlait comme le reste de ses membres. Elle comprit que tout à l’heure, dans la salle de bain, la peur lui avait fait se rétracter la plante entièrement à l’intérieur d’elle-même.

En passant sa robe, ses feuilles frémirent au contact du tissu, puis elles disparurent, dans un froissement léger, pour éviter qu’une boule disgracieuse ne vînt déformer se jolie silhouette de petite fille modèle, prête à accompagner sa mère pour se première visite dans une école parisienne.


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