Docte heure

Publié le 21 octobre 2008 par Danielrondeau
Voilà des jours, que dis-je, des semaines que vous n'oeillez point de mes mots. Eh bien, sachez que je ne me cure pas les narines pour autant. C'est qu'ici, voyez-vous, des femmes se meurent.
C'est le festival de l'ite: l'amygdalite mythique pousse la laryngite dramatique qui précède l'otite de la petite, ce qui entraîne une succession de raclements, de toussotements, d'éternuements et de sommeils manquants. Malgré les médocs et les soins, rien de tout cela ne semble vouloir partir. Au microscope, ces petits indésirables doivent avoir la tête de Stéphane Dion.
Au milieu de la morve gluante, des larmes, de la sueur, de la bave et du pue guttural, survit, tant bien que mal, un homme. Moi. Docteur papa! Superpapaman! Capitaine Bactéria! Le Batman du taxi qui, entre clinique et hosto, ne dort que d'une oreille, guettant le moindre étouffement pour se lever en trombe et étendre la pommade, essuyer la goutte, ramasser l'apitchoum, rassurer les cauchemardées et administrer les antibiotiques sucrés. Et parfois, je l'avoue, je crois sincèrement que Dieu se trouve dans une bouteille d'Advil pour enfants. Dans la bouteille pour adultes aussi, mais elle est plus difficile à ouvrir à la noirceur, avec les flèches à enligner et tout et tout.
Au bureau, on m'offre le remède de grand-mère chose et de grand-tante truc, mais je ne me résous pas à l'oignon dans les bas ou à la vapeur de citron cloué de girofle. Alors j'endure.
Chaque jour, je vois les traits s'allonger, les cernes se creuser, l'irritation nerveuse me gagner, et je me demande comment font ceux qui ont la progéniture nombreuse, je me demande pourquoi devient-on volontairement infirmière, mère Térésa ou soigneur du Canadiens.
Mais un jour, ce sera mon tour. Je tomberai malade, je le jure. Ce jour-là, je gémirai (j'adore geindre et gémir quand je suis malade), et on me frictionnera à quatre mains, comme il se doit.
Et je suis sûr qu'il s'en trouvera une pour dire que les hommes sont don' moumounes…